De la protection du littoral

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Oui vous le savez sans doute, le niveau de la mer monte inexorablement et les touristes trop nombreux abiment nos côtes. La végétation est piétinée et les dunes sont en passe de disparaître à certains endroits. Mais que fait donc Villeneuve ? En se lançant dans une nouvelle adaptation du chez d’oeuvre de Frank Herbert on pouvait espérer qu’il ne piétine pas trop le roman.

J’ai vu le film de David Lynch à sa sortie en 1984 avant de lire les premiers livres de Herbert la même année. J’avais adoré le film, et fatalement j’ai été subjugué par les livres que j’ai tous lu, plusieurs fois, sauf ceux de son fils, faut pas abuser non plus.

D’énormes pavés difficiles à traduire en images, d’ailleurs plusieurs s’y sont cassé les dents comme pour le Seigneur des Anneaux. Alors l’idée que Villeneuve en fasse plusieurs épisodes semblait bonne, car il prend son temps le bougre, et ça me va assez bien. Il a trouvé tout de même le moyen de supprimer quelques passages clés du roman comme un repas diplomatique qui donne un éclairage tout particulier au monde de Dune. Il va lentement mais accélère aussi, précipitant des événements qui arrivent plus tard dans l’histoire. Pour qu’elle raison ? Je ne sais pas, mettre en valeur un acteur, simplifier les parties complexes du récit, ajouter du suspense ? A vous de me le dire.

Après une mise en place réussie, les inexactitudes commencent, des détails qui n’apportent rien au film comme pendant la fuite de dame Jessica avec Paul ou le combat dans le repaire de l’Ecologiste Impérial. Je n’ai pas compris l’intérêt de la chose mais passons.

David Lynch avait également pris des libertés avec le livre comme ces modules étranges qui amplifiaient la voix et qui donnèrent quelques scènes ridicules, genre « Bouh, t’es mort ! ». Chacun ses casseroles après tout.

Mais ce qui m’a profondément dérangé ce sont les personnages et leurs rapports. Non dame Jessica n’a pas eu un garçon par ambition mais bien par amour pour son duc, relisez le livre bordel. C’est un détail mais cela change la manière dont est perçu le personnage. Duncan Idaho, le meilleur ami de Paul est un très bel homme, pas une grosse brute en dreadlocks et s’il est son meilleur ami, il le traite toujours avec le respect qu’il doit au fils d’un duc, ils ne sont pas potes de beuverie.

Il manque à cette version la grandeur et la noblesse des personnages de la précédente. Les sorcières bene gesserit ici ne font pas peur et les navigateurs stellaires ressemblent à des fourmis. Les Fremen sont dodus et trop bien nourris pour des hommes du désert comptant les gouttes d’eau de leur corps. Par contre je trouve que les harkonnens ont été plus subtilement que dans le premier opus.

Et puis vous savez quoi ? Je trouve que ces images du désert d’Arrakis ne payent pas de mine. Je vous l’ai dit, les dunes ont été trop piétinées depuis.

Par contre, la technologie à clairement de la gueule. Vaisseaux, ornis, chercheurs-tueurs, boucliers ressemblent beaucoup plus à ce que mon imaginaire avait pu fabriquer en lisant les livres qu’aux machins assez kitchs de la version de 1984.

Sinon, la BO, vous ne trouvez pas qu’elle ressemble souvent à celle de Toto ?

Maintenant irai-je voir la suite, si il y a une suite ? La réponse va de soit, oui évidemment, car je suis un geek et que la suite de l’histoire est fabuleuse. Et puis si je vais voir les Disney Star Wars, je peux bien sacrifier un peu de mon temps pour Dune quand même. Mais là pour le moment, c’est le nouveau James Bond qui me tente.

Apologie du totalitarisme

duneAvez-vous lu l’Empereur Dieu de Dune de Franck Herbert ? Dans ce roman, que je vous recommande chaudement, l’auteur raconte comment le fils de Paul Mouaddib Attreïdes, Leto, gouverne d’une poigne d’acier la planète Dune et l’Empire. Bien des passages de ce pavé, ressemblent à une apologie du totalitarisme. En dictateur éclairé, Leto gouverne les grandes maisons déchues, gardant le pouvoir absolu sur le ciment de toute une civilisation, l’Épice.

Ce n’est qu’un roman bien entendu, mais il m’arrive de me poser la question du bien fondé de la dictature. Oui je vous vois ruer dans les brancards, éructer, crier, hurler, et je vous comprends. Après de longs siècles de lutte, l’homme inféodé au seigneur et à la religion, s’est libéré de son joug et à gagné, au prix du sang, sa liberté.

Je n’ai pas ma carte du FN, et mes idées politiques son gauchisantes, pourtant je me pose la question.

Notre démocratie est-elle représentative de nos aspirations ? En France, nous élisons un président, toujours issu d’un parti jusqu’à présent, de gauche ou de droite. Cet élu, à lui-même été choisi parmi les cadres de son parti ou par des électeurs lors de primaires (la nouvelle vogue). Il arrive avec un programme à peine esquissé, promet de régler tous les problèmes de la terre, chômage, insécurité, immigration, pouvoir d’achat, homophobie… Une fois au pouvoir, il choisit un premier ministre avec forces de compromis, premier ministre qui à son tour choisi son équipe ministérielle souvent déjà négociée lors des arrangement pré électoraux. Ensuite, ce sont nos députés, élus pour cinq ans au suffrage universel direct, et les sénateurs élus pour six ans au suffrage universel indirect qui approuvent nos lois. Mais vous connaissez tout cela et sans doute mieux que moi-même.

Quand le gouvernement en place ne dispose pas d’une confortable majorité à l’assemblée, on appelle ça la cohabitation, moi j’appelle ça le bordel et c’est déjà arrivé. Même avec une bonne majorité, cela peut devenir chaotique. Si la ligne du gouvernement dérive à droite alors que la majorité est de gauche, des textes de loi peinent à franchir les portes de l’assemblée.

N’oublions pas que les français sont volages. Au lendemain des attentats nos forces de l’ordre étaient des héros, aujourd’hui, à cause d’une matraque mal placée, ils sont des salops, tous… Il en va de même avec nos élus qui passent de sauveurs à traîtres en quelques mois. Oui mais voila, nous avons signé pour cinq ans, réjouissons-nous et avant c’était sept. Lorsque nos gouvernants ne nous plaisent plus, il ne nous reste qu’à aller crier notre colère dans la rue. Pour ce que ça sert… Et c’est tant mieux. Car si nous étions consultés en permanence pour savoir qui mettre au pouvoir, les hommes politiques seraient en campagne permanente et n’auraient plus de temps pour gouverner. Ceci dit, c’est un peu ça non ? Nos dirigeants ont besoin de temps pour mener leurs réformes, c’est évident, mais quand nous sommes opposés à ces réformes, ils ont justement le temps de les faire passer quand même. Par chance, il y a de la vaseline en pharmacie.

Existe-t-il des alternatives à notre cinquième république ?

La sixième de Mélenchon ? Barf… Je préfère celle de Malher, mais bon.

Une consultation directe et populaire sur tous les projets de lois ? Deux jours après un attentat nous serions en guerre contre la Syrie et une semaine plus tard nous ouvririons nos portes aux réfugiés du monde entier à cause d’un enfant noyé sur une plage pour fermer nos frontières quinze jours plus tard à cause d’un viol commis par un soit disant étranger. Je ne crois guère en la sagesse populaire… Les sujets sont complexes, épineux et demandent d’y réfléchir à deux fois en pesant le pour le contre, en maîtrisant bien toutes les conséquences de la décision, pas sur le coup de l’émotion ou de la colère.

Oligarchie ? Le peuple élit des homme puissants et cultivés, et eux en grands sages avisés nous conduisent vers un monde meilleur où le bien de chacun est préservé ? Cela ressemble au Meilleur des Mondes d’Aldous Huxley. Comment savoir si nos oligarques ne servent pas avant tout leurs intérêts avant ceux du peuple ? Et que savent-ils du peuple, le pain au chocolat à 15 centimes ?

Et la dictature ? Une bonne équipe qui impose aux forceps des mutations radicales dans notre société, ça vous tente ? Pas de député empêcheur de tourner en rond pour bloquer le système, quel bonheur ! Pas de fonctionnaire ministériel qui retarde la publication d’un décret. Le paradis… Attention, je ne parle pas d’une république bananière comme dans Cent Ans de Solitude. Je parle d’une dictature exempte de corruption, vous voyez un peu comme une dictature communiste, avec un vrai modèle social et tout et tout. Comment ça, ça ne marche pas ? Ils ne sont pas heureux les nord-coréens ? Oui bon d’accord, peut-être pas tant que ça.

Eh, dites, et l’anarchie ? Une anarchie constitutionnelle bien entendue. Comment ça, ça n’existe pas ? Ah mince… Bon ben alors, pas de gouvernement, chacun pour soit, marche ou crève. Bon heu, trop peu pour moi, je suis du côté des faibles, moi…

En fait je n’en sais rien, je n’ai pas d’idée, je m’en fou un peu tant que mon petit confort n’est pas trop chamboulé. Après tout j’ai un travail, enfin tant que Fillon n’est pas élu, tout le monde n’a pas cette chance de nos jours. Nos enfants trouverons bien la solution, l’avenir aux jeunes après tout, viva Macron ! Oui enfin, si, comme dans le Soleil Vert ou l’Age de Cristal, les vieux étaient recyclés passé un certain âge, ça solutionnerait le problème de retraites ? Ok, revenons à la gérontocratie, nous n’en somme pas si loin après tout et je n’ai pas envie d’être bouffé par mes gamins. C’est vorace les ados.

A tout bien réfléchir, notre système n’est pas si mauvais. Bien entendu, le cumul des mandats, la corruption, le lobbying devraient être banni. Nos députés devraient être compétents sur les sujets pour lesquels ils votent, il faudrait qu’ils soient présents également et n’emploient pas leur famille avec les deniers de l’état, il faudrait que les projets de lois ne soient pas dénaturés par des tonnes d’amendements, que sur les grandes questions, le peuple soit consulté, et ce très régulièrement. La fonction de président par contre ne me semble pas indispensable mais nous venons d’une monarchie, ne l’oublions pas et nous avons encore du mal à nous passer d’une figure de proue ou d’un bouc émissaire. Serait-il possible de voter pour un projet défendu par un groupe politique et non un homme. Ils formeraient un gouvernement et mèneraient une politique en faveur des hommes et non de l’économie de marchés. On peut rêver.

Ce qui me fait rire à gorge déployée en ce moment, c’est notre Babar américain, Trump, qui goûte aux joies du pouvoir, de la nécessité de composer avec la loi, les médias, le peuple en colère, les pays voisins et son propre parti. Il croyait changer la face des Etats-Unis en quelques décrets, le voila empêtré jusqu’au cou dans la mélasse gluante de ses propres contradictions et du système. C’est ça aussi le pouvoir.

Les élections approchent, et le bruit des bottes résonne dangereusement sur le pavé. Même, si comme moi, vous ne croyez guère au système et aux hommes politiques, réfléchissez avant de mettre votre bulletin dans l’urne en mai. Ce n’est pas parce qu’ils sont tous les mêmes qu’il faut aller se jeter dans la gueule du loup, croire aux remèdes miracles et céder aux pressions xénophobes, islamophobes, homophobes, bref tous les phobes. Le remède sera pire que le mal soyez-en certain. Mieux vaut des vieux singes corrompus que de dangereux extrémistes incompétents.