Bibliophile

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Hier, après une journée éprouvante au travail et malgré la fatigue accumulée, j’ai décidé de pousser à vélo jusque l’unique libraire de ma ville.

Avez-vous remarqué que les automobilistes avaient oubliés que les cyclistes existent encore ? Avez-vous remarqué que les masques rendent les piétons sourds ? Arriver en un seul morceau chez Pedro (c’est ainsi que s’appelle mon) marchand de rêve, ne fut pas une mince affaire. Mais j’ai survécu.

Un seul libraire pour vingt-sept-mille habitants et par chance un vrai libraire passionné.

Alors plutôt que de commander à la Fnac, acheter des livres sous cellophane au supermarché ou pire encore, aller sur Amazon, je suis allé dans sa petite libraire.

Mon libraire, lorsqu’il a dû fermer, s’est mis à raconter sur Facebook, avec la passion qui le caractérise, les livres qu’il avait aimé depuis son enfance, des premiers Astérix Le Gaulois jusque que les romans de la Table Ronde

Un masque sur le visage, j’ai pris bien soin de lire les consignes embuées et de laver mes mains au gel avant de rentrer dans le Saint Des Saints, la librairie. Partout des bouquins, la bonne odeur du papier, les jaquettes tentatrices et quelques lecteurs farfouillant au rayon des nouveautés.

Car croyez moi, deux mois à fonctionner en autarcie sur sa bibliothèque personnelle sans approvisionnement externe, sans médiathèque ouverte, sans libraire, c’est l’enfer pour un lecteur.

Je suis allé immédiatement au rayon science-fiction, ma lecture de prédilection, avant de farfouiller ensuite du côté des polars, mon second vice. Côté SF rien de connu au premier abord sauf le troisième tome de Grand Siècle, une uchronie dont je n’avais pas commencé le cycle. Côté polars je suis tombé sur un bouquin dont j’avais entendu du bien sur le blog littéraire de Emotions, MotherCloud de Rob Hart Côté BD, le tome deux de Hope n’étant pas encore sorti (peut-être en juillet), je suis resté bredouille.

Pas facile de choisir un livre sans l’ouvrir pour en lire quelques pages, mais c’est toujours mieux que rien. Au final je suis reparti avec trois livres, les tomes deux et trois de Grand Siècle, (personne n’aurait le tome un par hasard car il est épuisé ?) et MotherCloud. J’ai oublié de regarder du côté du Joël Dicker, l’Enigme de la Chambre 622, recommandé à deux reprises. De toute façon j’adore Joël Dicker. Il va donc falloir que je repasse chez mon libraire.

à ma zone

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Mon libraire craint de mettre la clef sous la porte, les disquaires ont presque tous disparus des grandes villes et certaines boutiques de jeux vidéos sont en passe de fermer. A la place poussent des enseignes de vapotage et des opticiens.

Avant le règne de Virgin, La Fnac, Cultura, Amazon, Ali Express fleurissaient des magasins spécialisées tenus par des passionnés. Aujourd’hui, dans ces supermarchés physiques ou virtuels de la culture, on trouve de tout ou presque, jeux, BDs, livres, CDs, vinyles, mini chaînes, téléphones, appareils photos, mixeurs, vibromasseurs. Les vendeurs, dans les rayons, même avec la meilleure volonté du monde, sont incapables de vous conseiller utilement, passant d’une grand-mère cherchant un grille pain à un métalleux en quête d’un obscur groupe de doom écossais.

J’ai encore la chance aujourd’hui d’avoir un libraire qui connaît mes goûts et me conseille, me faisant découvrir des merveilles, ma boutique de disques d’occasion avec son vendeur fan de groupes de métal atmosphérique à chanteuses et un magasin qui ne vend que des vinyles juste à côté et qui soutient la scène locale.

Je commande les livres chez mon libraire, après tout, un livre peu bien attendre une semaine. Pour la musique j’essaye d’abord chez mes disquaires mais il faut avouer que souvent je commande directement aux groupes; ce que j’écoute n’est pas franchement mainstream. J’ai aussi mon photographe, mon magasin audio et de bandes dessinées. Ils sont un peu plus chers parfois, mais de bon conseil, alors je ne fais pas comme beaucoup, posant mes questions dans la boutique et achetant ensuite en ligne. Un jour sinon le conseil fermera ses portes faute de clients.

Je n’achète pas sur Amazon, je fais mes courses au petit supermarché du coin, j‘achète mon pain chez le boulanger, je vais à la boucherie, au marché. J’essaye de faire travailler les magasins de proximité, pas les grands groupes esclavagistes. Attitude de riche ? Pas vraiment. L’achat en ligne coûte cher, rien qu’en considérant les frais de ports. Et si de grandes enseignes cassent les prix à la sortie d’un disque, elles se rattrapent largement quelques mois plus tard, car le stock c’est la mort de leur business.

Se balader dans les rues, faire du lèche vitrine, entrer dans une boutique attiré par un nouveau livre et ressortir avec trois autres, après avoir discuté avec un libraire passionné, c’est autrement plus plaisant que d’attendre que le facteur passe devant sa boite aux lettres vous ne trouvez-pas ?