La dérive

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Nous allons parler une fois encore de notation.

L’objectif de l’éducation nationale est que 90% des français obtiennent leur baccalauréat. Comment y arriver ? Améliorer l’enseignement ? Non trop compliqué. Rendre les français intelligents ? Impossible. Donner le bac dans une pochette surprise ? En voila une bonne idée.

Pour les chroniques, c’est un peu la même chose semblerait-il. Avez-vous calculé la moyenne des notations dans un webzine ? Elle tourne le plus souvent autour de 4/5, 9/10 ou 18/20, à croire que tous les albums critiqués sont très bons ou que les quelques bouses sont sauvées par de grands chef d’œuvres.

Certains magazines n’hésitent pas à affiner l’échelle avec du 4.6/5 afin de différencier l’album à 4.5, du suivant, un tout petit peu supérieur qui aura 4.6… A quand le 4.657124 ? D’autres ont supprimé la note, tout simplement, lisez le texte, vous saurez ce que nous en pensons, moi j’aime bien l’idée même si les artistes préfèrent souvent les étoiles (ça leur évite de lire).

Lorsque nous écoutons le meilleur album d’un groupe, nous avons tendance à lui donner la note maximale – encore que certains chroniqueurs se l’interdisent systématiquement, car la perfection n’existe pas – mais si l’album suivant était meilleur encore, que ferions-nous alors ?

Si dans la carrière d’une groupe, il y a une petite faute de parcours, il est rare que l’album soit sanctionné. Comment punir un groupe que l’on aime ?

Il existe des chroniqueurs lèche boules, mais nous en avons déjà parlé. Il existe ceux qui ne donneront jamais la note maximale. La sélection naturelle joue également beaucoup sur la notation : les chroniqueurs choisissent de préférence de bons albums à des merdouilles innommables pour leurs longues heures d’écoute.

On refuse aux mauvais élèves l’entrée en terminale et du coup les statistiques au bac sont excellentes. Ça s’appelle l’élitisme.

Mais qu’est-ce qu’un mauvais album après tout ? Une mauvaise production, un manque d’originalité avéré, une musique inaudible ?

Quel note donneriez-vous au premier album de Genesis, Genesis to Revelation ? Parce que bon voila quoi, honnêtement, sa production est épouvantable, la musique n’a pas encore atteint la maturité d’un Foxtrot et on retrouve dans ces premiers balbutiements la marque de nombreux groupes de l’époque. Alors… Vous lui donneriez quoi ? Un 2/5 ? Vous oseriez ? Non ? Normal, c’est quand même un album de Genesis. Pour continuer dans cet exercice, prenons Calling All The Stations ou Abacab. Vous leur donneriez combien si ce n’était pas Genesis qui les avait pas composé ?

Tout est relatif donc.

Chez nous, cette dérive est palpable, les albums ayant moins de trois étoiles se font rares. Comment contrer cette dérive ? Chroniquer de très mauvais albums quitte à descendre des artistes en devenir. Se faire mal au oreilles à se dégoûter de chroniquer ? Mauvaise idée. L’inflation semble donc inévitable alors à quoi sert encore la note, je ne sais pas. D’ailleurs, à quoi sert le Bac ?