Arjen Lucassen – Songs no one will hear

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La fin des temps arrive, une météorite va percuter la Terre dans cinq mois et personne n’en réchappera.Tel est le scénario du dernier long métrage post-apocalyptique de Lucas film, Songs no one will hear.

J’ai dit long métrage ? Vous l’aurez corrigé vous même, il s’agit bien d’un album de métal progressif, le second album solo du prolifique compositeur derrière Ayreon, Star One et bien d’autres projets, le grand Arjen Anthony Lucassen.

Dans une autre vie, Arjen m’avait avoué, que le projet dont il était le plus fier à ce jour, était Lost In The New real, son premier album solo sorti en 2012 et qu’il rêvait d’en écrire un second. Il aura fallu patienter treize années pour qu’il concrétise son projet, mais cela valait le coup d’attendre.

Songs no one will hear un est bébé de cinquante minutes et neuf titres, dont un de près d’un quart d’heure, qui mélange folk, métal et progressif à la sauce Ayreon et compagnie.

Je me suis offert l’édition physique quatre disques pour les morceaux bonus mais aussi pour écouter la narration de Mike Mills absente de la version proposée sur Bandcamp. En bonus j’ai eu les paroles, de belles illustrations et les neuf pièces en versions instrumentales sans parler du blu-ray que je n’écouterai sans doute jamais.

Aux côtés de Arjen, vous allez entendre plein d’autres musiciens, musiciennes, chanteurs et chanteuses. Je n’en citerai que quelques-uns parce que la liste est longue : Joost Van Den Broek à l’orgue Hammond, Irene, Floor Jansen, Marcela Bovio au chant et Mike Mills comme narrateur. Beaucoup de monde mais c’est Arjen qui reste aux commandes, au chant, guitares, basses, et claviers.

Question instruments exotiques vous vous régalerez avec du violon, de la flûte, du hurdy gurdy, de l’orgue Hammond et du violoncelle sur un métal progressif des plus mélodique bouré de refrains accrocheurs.

Mais je ne vais pas vous mentir, Songs no one will hear, n’est pas d’une grande originalité. C’est un blockbuster au scénario convenu et à la musique archi confortable, du Ayreon en version courte avec nettement moins d’invités. Mais moi, cela me va parfaitement, je suis un fan de la première heure du bonhomme et son nouvel album solo est bien meilleur que le Transitus sorti il y a déjà cinq ans.

Les chansons abordent différentes problématiques de la fin du monde : l’effondrement de la société, le conspirationnisme, comment vivre ses derniers jours, les regrets, les projets, la solitude… Et puis il y a ce bus bleu qui vous emmène sur l’île où s’écrasera bientôt l’astéroïde, la Sanctuary Island du Dr Slumber, un bel endroit situé aux premières loges pour attendre la fin du monde.

La narration de Mike Mills apporte une touche humoristique et sarcastique à cette histoire de fin du monde. L’album perd beaucoup de son sel dans sa version expurgée même si les titres ‘Goddamn Conspiracy’ et ‘Shaggathon’ apportent leurs touches de dérision à l’histoire.

Dans un autre registre, la performance de Floor Jansen dans ‘We’ll Never Know’ est absolument sublime, comme toujours me direz-vous.

Les quatres titres bonus sont parfaitement à leur place à côté de l’album. Ils ne se seraient pas bien intégrés dans l’ensemble, n’empêche, ils méritent plus qu’un détour et j’ai tout particulièrement aimé le clin d’œil à Elon Musk dans ‘Mr M’s Amazing Plan’.

Par contre la version instrumentale des huit morceaux n’a guère d’intérêt pour moi, il manque cruellement les voix…

Science-fiction, fin du monde, humour, folk, métal progressif, Songs no one will hear est un excellent divertissement musical mais pas forcément le chef d’œuvre de l’année pour autant. 

Même si je suis un grand fan d’Arjen, je suis capable de garder la tête froide. Mais si vous aimez le travail du bonhomme, foncez l’écouter et dans sa version intégrale.

Saor – Admidst the Ruins

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Il n’y a que Stéphane Gallay pour recommander des groupes comme Saor et moi pour les écouter. Imaginez donc, du black métal marié à du folk qui accouche d’une galette dans les tourbières écossaises. Voici à quoi peut ressembler Admidst the Ruins, le nouvel album du groupe Saor.

Admidst the Ruins propose cinq titres de huit à quinze minutes pour une durée totale de près d’une heure où vous entendrez des flûtes, des pipes, des sifflets, du violon, de l’alto, du violoncelle et tout l’attirail électrique du métal sans parler de chant clair et de growl.

C’est la participation de la violoncelliste Jo Quail sur le morceau ‘The Sylvan Embrace’ qui a motivé ma première écoute de l’album, même si au bout du compte, elle est assez anecdotique. En plus mon chroniqueur suisse préféré en disait beaucoup de bien. 

L’achat a naturellement suivi. Pourtant j’ai trainé à en parler. C’est qu’il faut tout de même être dans un certain état d’esprit pour écouter ce folk pour le moins caverneux. 

Il n’y aurait pas le growl et quelques poussées de testostérone Admidst the Ruins pourrait presque passer pour un album de The Coors. Instruments à vent, à cordes et percussions jouent des mélodies dansantes dignes des paysages des highlands et la voix claire de Jira souligne encore ce trait.

Mais le druide qui se tient dans un cromlech au milieu des montagnes et l’ouverture fracassante du titre album annonce la couleur. Il y aura du black métal au menu avec le haggis.

‘Echoes of the Ancient Land’ ne lève pas le pied, bien au contraire et s’il offre des accalmies instrumentales salutaires, le chant viril revient vite à la charge, soutenu par une déferlente de double pédale.

‘Glen of Sorrow’ propose une accalmie dans cette tempête métal folk s’il n’y avait les roulements de tambours d’une armée en marche. Difficile de ne pas visualiser les hommes d’un clan avançant dans la vallée au son des cornemuses. 

Mais si vous voulez un morceau vraiment atmosphérique, attendez le court ‘The Sylvan Embrace’ qui ne dure que huit minutes. Là, même Andy cesse de hurler pour murmurer. On est en pleine mystique indo-européenne où le druide sanctifiait le gui et célébrait la fertilité en frottant son popotin contre des menhirs. Des hérésies historiques qui ont connu leur heure de gloire à la fin du dix-neuvième siècle. Parce que, soyons clairs, les mégalithes, c’est trois mille ans avant les celtes… Bon passons.

L’album s’achève avec ‘Rebirth’ dont la seconde moitié est un air traditionnel celtique magnifique et très connu, mais impossible de lui mettre un nom dessus désolé, pourtant j’ai cherché dans les classiques.

Sorti du fatras pseudo celtico mystique, ce dernier album de Saor est fortement recommandable pour qui n’a pas peur des mélanges hydromel single malt.

Dim Gray – Shards

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Après le magnifique Flown il y a cinq ans, un Firmament qui m’avait un peu déçu en 2022, Dim Gray revient cette année avec leur troisième album studio intitulé Shards. 

Le groupe norvégien, tout d’abord trio en 2020 puis devenu depuis quintette, sort un disque neuf titres d’une quarantaine de minutes. Du rock progressif folk symphonique dominé par le chant et une guitare à la signature très particulière.

Comme souvent dans mon cas, il est question de voix, de mélancolie et de piano. Avec cet album, Dim Gray coche toutes ces cases et plus encore. Comble du bonheur, mon épouse aime beaucoup leur musique, même si elle la trouve un peu bizarre, ce qui m’autorise à l’écouter à fond et en boucle dans le salon.

L’arrivée de Shards a encore une fois bousculé ma programmation musicale et deux de mes derniers achats de l’année attendent dans un coin que je daigne revenir vers eux. 

Du chant à deux, voire trois voix, avec Oskar, Hakon, au timbre très particulier, qui est lead sur trois titres et la chanteuse de pop-jazz norvégienne Vaarin sur le second morceau ‘Myopia’. Du rock progressif avec des violons, violoncelles, mandoline, sitar, santour, piano, synthétiseurs, guitares, basse et batterie, bref une musique très riche sans être écrasante.

Dès les premières notes de ‘Defiance’, j’ai su que j’allais tomber amoureux de cet album. La guitare au style americana conjuguée à la voix d’Oskar ainsi qu’aux notes de piano tissent immédiatement une ambiance assez unique, cinématique et mélancolique qui colle aux paysages et émotions décrits de la chanson.

‘Murals’, le troisième titre de l’album, impose tout particulièrement sa patte folk. Il me fait penser aux danses irlandaises endiablées et la voix étrange de Hakon renforce cette impression.

J’aime également beaucoup la ballade au piano de ‘Mooneater’. Mais bon, si je ne craquais pas pour ce genre de morceau, je ne serais plus moi. Le titre est mélancolique et cinématique, quasi religieux, le genre de merveille entre Anathema et Big Big Train que je peux écouter boucle pendant des heures.

Et après son début intimiste, ‘Little One’ emprunte quelques secondes au prog symphonique des seventies de Genesis avec des claviers à la Tony Banks pour revenir à une musique plus calme ensuite.

Il n’y a vraiment que des merveilles dans cet album, mais bizarrement, je n’accroche pas plus que cela avec ‘Attakulla’, le grand format de dix minutes qui clôture l’album. Je n’y trouve pas de vrai point d’ancrage sorti de sa très belle ouverture quasi à capella. Il lui manque peut-être quelques rebondissements dans sa structure.

Malgré ce bémol, Dim Gray revient avec un troisième et très bel album que je vais certainement acheter en vinyle, dès qu’il sera disponible en commande en Europe. Allez l’écouter d’urgence sur Bandcamp, vous m’en direz des nouvelles.