L’équilibre

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Quand vous trimbalez un équipement de 50 kilos dans le coffre, vous n’imaginez pas forcément que vous allez marcher en équilibre sur un fil.

Mais voilà, un télescope installé sur une monture équatoriale motorisée, c’est du réglage d’horlogerie malgré son poids.

Le tube du télescope pèse plus de 6 kilos et nécessite un contrepoids de 5,5 kilos pour l’équilibrer sur ses deux axes, déclinaison et ascension droite.

Mais sur le tube, vous allez également installer un chercheur, un renvoi coudé, un oculaire, peut-être un appareil photo, et le poids initial de 6 kilos passe rapidement à 8 voire 9 kilos avec un fort moment du fait que l’appareil se retrouve au bout du tube à plusieurs centimètres à l’arrière du miroir.

Dans cette configuration, je suis obligé de placer le contrepoids au point le plus éloigné de la monture, de remonter le tube le long de son axe et même ainsi, l’équilibre est très précaire.

Du coup j’ai ajouté un contrepoids de 3 kilos sur la monture et une masselotte de 800 grammes à l’avant du télescope, sur un rail bricolé pour l’occasion pour compenser la masse de l’appareil.

À chaque changement d’équipement, je dois rééquilibrer le télescope, déplacer les contrepoids et les masselottes sur leur axe.

L’autre solution consisterait à alléger la charge utile. Et cela tombe bien puisque je dispose également d’un petit appareil photo hybride Panasonic Lumix G9. Il pourrait me servir pour la photographie par projection. 

La photographie par projection est une méthode qui consiste à placer un oculaire au foyer du télescope et le boîtier derrière. Cette technique, qui permet de faire de la photographie planétaire,  nécessite un long adaptateur de 10 cm dans lequel il faut glisser l’oculaire et au bout duquel est vissé le boîtier photo sur une bague T2.

Le poids de l’oculaire plus celui de l’adaptateur, de la bague d’adaptation T2 et du boîtier photo sans parler du moment généré par la longueur de l’ensemble rendent l’installation très instable. Du coup je vais tester les qualités astro photos du G9, qui est un boîtier 4/3, pour cette configuration. Il pèse 500 grammes de moins que le Z8.

Me voilà donc avec deux adaptateurs T2, un pour monture Z, l’autre pour micro 4/3, un adaptateur pour la projection, un nouveau contrepoids, deux masselottes, un rail de 69 cm et un boîtier photo supplémentaire à emporter lors des sorties astronomiques. 

Après une nuit d’insomnie, j’ai réalisé que les deux contrepoids Neewer respectivement de 300 et 500 grammes pouvaient être vissé directement sur la queue d’aronde du télescope sans avoir à installer un rail supplémentaire. J’ai installé le télescope dans le salon, vissé les contrepoids au tube et testé toutes les combinaisons d’accessoires, Nikon Z8, Panasonic Lumix G9, oculaires, renvoi coudé, projecteur avec G9. J’ai noté sur la queue d’aronde les points d’équilibre et veillé à ce que mon tube dérive légèrement vers l’est.

Le télescope est prêt, d’ailleurs samedi matin, à 6h, alors que tout le mode dormais, j’ai testé pour la première fois l’adaptateur de projection avec un oculaire 9 mm et le G9 sur la planète vénus qui se levait à l’horizon. Et ça marche !

Alors non, ce n’est pas la lune, c’est bien la planète Vénus situé à 41 millions de kilomètres. Venus présente aussi des phases.

Insomnia

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Les vacances c’est fait aussi pour s’autoriser quelques folies comme par exemple passer des nuits blanches sous les étoiles.

Dimanche soir, alors que le mercure bouillait en plaine, j’ai pris la route du Champ du Feu, misant sur une fenêtre de ciel clair assez large.

Avec les nuits qui rallongent, je peux arriver sur place dès 20h30. Le temps de mettre le télescope en station, la nuit est déjà là et les premières observations peuvent commencer.

Sur la route près du village de Ottrot, j’ai croisé un renard curieux et en haut, au Champ du Feu, je suis tombé sur de nombreux astronomes amateurs. Il y avait deux Newton, un Cassegrain Schmidt, un Dobson et deux marcassins.

J’étais monté pour faire de longues séries d’images : un filé d’étoiles et du ciel profond. J’avais donc prévu un siège pliant en prévision des longues attentes. Car pendant que le Nikon travaille, il n’y a rien d’autre à faire qu’admirer le ciel.

Mon voisin le plus proche avait un énorme télescope Dobson équipé d’un miroir de 400 mm. Un instrument très particulier puisqu’il ne dispose d’aucune monture et qu’il faut le pointer vers les étoiles à la main. 

Après une mise en station minutieuse, avoir lancé ma première série de photographies sur la nébuleuse planétaire de la Lyre et un filé d’étoiles centré sur la polaire, j’avais une demi-heure à tuer alors je suis allé rendre visite à l’heureux propriétaire du Dobson. Un télescope acheté sur le Boncoin pour une misère, un magnifique instrument très lumineux équipé en plus d’oculaires à grand champ. 

Bref, ce que j’ai pu contempler dans don oculaire m’a ébloui comme les dentelles du cygne ou la nébuleuse Oméga. 

Pendant que je faisais de l’astronomie visuelle avec mon voisin, le Celestron continuait à photographier le ciel profond,  la galaxie M 51 des Chiens de Chasse et justement la nébuleuse M 17 du Sagittaire.

M 51

Lorsque Saturne et Jupiter furent assez hauts dans le ciel nous sommes passés au planétaire avec même un passage par Neptune. Nous sommes revenus au ciel profond avec la nébuleuse du Clown, la galaxie d’Andromede, l’amas M 15 et bien d’autres objets encore. 

Lorsque mes trois cent clichés furent terminés, j’ai démonté le boîtier photo et nous avons utilisé le Celestron avec les oculaires grand champ de mon voisin. Maintenant, je sais ce que je vais m’offrir à Noël. 

M 17

C’est là que l’heureux possesseur du Dobson m’a parlé du passage de IO devant Jupiter vers 4h du matin. Je pensais être couché depuis longtemps lorsque cela se produirait mais en réalité, il était déjà 3h30 du matin. Alors je suis resté admirer l’incroyable passage du satellite devant sa planète avec son ombre portée pas loin de la tâche rouge.

M 31

Après avoir démonté mon setup, salué tout le monde, je suis redescendu vers la plaine, profiter des dernières heures fraîches de la nuit. A 5h30 j’étais sous la couette. A 6h30 je buvais mon café. A 7h00 je commençais à développer mes photographies. Du coup, le livre lundi soir, je ne suis pas remonté dans les Vosges. J’ai attendu vingt-quatre heures avant de repartir.

Le Champ du Feu

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Depuis l’arrivée du télescope dans ma vie d’astronome très amateur, je ne suis monté qu’une fois au Champ du Feu avec le matériel. C’était en plein hiver, à l’époque où je ne maîtrisais pas du tout les rudiments de la mise en station d’un instrument.

Je me suis beaucoup entraîné dans le jardin, en pleine ville, coincé entre quatre clôtures assez hautes et ébloui par le lampadaire des voisins, craignant toujours que l’un d’entre eux me surprenne en pleine action et me dénonce à la police pour voyeurisme.

Vendredi soir, j’ai voulu retenter l’expédition de cet hiver, avec vingt degrés Celsius de plus et un soleil se couchant trois heures plus tard.

Expédition, car le Champ du Feu de situe à trois quart d’heure de voiture de la maison, à plus de mille mètres d’altitude et qu’il faut y transporter tout le matériel : monture, tube, oculaires, télécommande, appareil photo, siège, pied, bouteille d’eau, boussole, niveau à bulles, smartphone, objectifs… Un véritable déménagement.

Mon fils n’a pas voulu m’accompagner et ma femme n’a pas eu non plus ce courage. 

Je suis arrivé là haut pour le coucher du soleil. Et miracle, cette fois, je n’étais pas tout seul comme lors de ma précédente expédition. Trois campings car étaient stationnés pour la nuit sur le parking et il restait quelques promeneurs sur le sommet.

J’ai commencé par mettre en station la monture équatoriale allemande, orientation au nord, mise à niveau, équilibrage puis j’ai installé dessus le boîtier photo équipé d’un 500 mm. C’est avec cet attirail que j’ai capturé les derniers instants du soleil se couchant sur les Vosges. La température a vite baissé et j’ai regretté de ne pas avoir mis des chaussettes et une doudoune chaude, car passé minuit j’avais froid.

C’est à peu près à ce moment qu’est arrivé le tout premier d’entre eux. Une voiture blanche s’est approchée doucement de mon installation, la vitre côté conducteur s’est baissée et une personne avenante m’a salué : « Bonsoir, vous faites de l’astro photo ? Moi aussi. Je m’installe un peu plus bas mais je viendrai vous voir après. ». C’était Arnaud, un photographe, astronome amateur, chasseur d’orage de Sélestat.

Puis une autre voiture est arrivée, puis une autre et encore une autre jusqu’à que cinq groupes d’astronomes du vendredi soir soient installés sur le parking. Cette fois, entre deux photos, c’est moi qui suis allé les saluer. Il y avait de tout, du Dobson, du Newton, du Schmitt Cassegrain, un club, des solitaires et des curieux.

Très vite nous avons échangé sur le matériel, les problèmes techniques, les photos avant d’achever, chacun dans notre coin, la mise en station du matériel : alignement polaire, calibration du GoTo, équilibrage fin de l’équipement.

La séance d’observation a pu commencer. Après Venus, j’ai pointé l’amas globulaire M 92 pour tester la configuration. Mon voisin, n’ayant jamais pointé l’objet, est venu observer l’amas et s’est empressé de retourner le pointer sur son Newton. Cependant, son objectif ce soir là, était la galaxie M 101 avec la supernovae qui brille sur un de ses bras spiralés. 

Je me suis dit que je pourrais copier et j’ai pointé l’objet. Sublime ! 

M 101 – empilement de 10 clichés

Comme mon installation semblait bien réglée pour une fois, j’ai quand même fait deux calibrations et deux alignements polaires, j’ai poussé certaines photos jusque quatre-vingt secondes de pose. Un record sans trop de trainée. J’ai également lancé plusieurs séries d’une vingtaine d’images qui m’ont permis d’aller espionner mes voisins pendant que le boîtier faisait son travail.

M 82 avec 21 photos

Voici mon tableau de chasse de la soirée : M 92, M 101, M 82 et M 27, quatre magnifiques objets du catalogue Messier, deux galaxies, une nébuleuse et un amas globulaire. Des petites séries de photos que je vais essayer d’empiler dans le logiciel Siril pour voir ce que cela donne.

Outre de relativement bons résultats photographiques en comparaison des précédentes sessions, j’ai fait de belles rencontres dans la communauté des astronomes amateurs de la région. Une expérience qui va certainement me motiver à manquer des heures de sommeil pourtant précieuses et que je ne vais pas rattraper au travail ni pendant les concerts à venir.

M 27 avec 19 images

Pavel Bahtinov

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Comment ça, vous ne connaissez pas Pavel Bahtinov ? Vous n’avez jamais lu Guerre et Paix, Anna Karénine ou La Maison Russie !

Bon je l’avoue, ces ouvrages n’ont rien à voir avec l’astronome russe Pavel Bahtinov. D’ailleurs, la semaine dernière je ne connaissais même pas son nom.

J’ai entendu parler de lui dans un article traitant de la mise au point en photographie astronomique sur le blog Astronomie Pratique que je vous recommande au passage. Pavel Bahtinov à conçu un masque à installer sur sa lunette ou son télescope pour faciliter la mise au point.

Comment ça marche ?

Si vous avez fait un peu d’optique, vous avez probablement entendu parler des diffractions. La lumière étant une onde, lorsqu’on lui oppose des obstacles d’une certaine taille, elle se comporte d’étrange manière, créant des figures géométriques caractéristiques. Les diffractions.

Le masque de Bahtinov, une simple grille en plastique placée au sommet de votre instrument, permet de dessiner des figures qui vont vous aider à faire la mise au point de votre instrument. Dans l’illustration ci dessus vous pouvez voir le masque à gauche et la figure de diffraction à droite obtenue en pointant une étoile lorsque la mise au point est bonne.

Mais je ne suis pas là pour plagier l’article de Astronomie Pratique. Par contre, lorsque j’utilise mon appareil photo au cul du télescope, j’ai pas mal de difficulté à faire une bonne mise au point sur l’écran du Z6 II. Donc la méthode du masque de Bahtinov m’interagissait au plus au point.

Sauf que, sur Astroshop.de, un masque de Bahtinov pour mon instrument se vend 39,90 euros et dans l’article il conseillait celui de Vincent, réalisé avec une imprimante 3D, qui lui est vendu 34,90 euros. Un peu cher pour un bout de plastique.

C’est alors que j’ai eu une illumination, si le masque pouvait être imprimé en 3D, il devait exister des fichiers pour le réaliser sur la toile. Et en effet, sur Guithub vous trouvez un générateur SVG de masque de Bahtinov et sur Mito3D vous trouvez également des fichiers d’impression.

Sauf que je n’ai pas d’imprimante 3D. Par contre j’ai un fils très geek qui dispose de trois imprimantes, deux à résine et une à filament et qui ne désire qu’une chose, imprimer des trucs pour ses gentils parents. Il nous a déjà réparé le pommeau de douche, imprimé un système d’irrigation pour le potager alors quand je lui ai demandé de m’imprimer un masque de Bahtinov en lui promettant une bière, il revenait à la maison, trois heures plus tard avec un machin rond de couleur orange que j’allais pouvoir fixer au sommet du télescope et deux bières locales pour se réhydrader.

J’avoue, il a fallu poncer le masque pour le mettre en place, mais c’est de ma faute, je lui avais fourni un modèle pour un instrument dont le miroir secondaire était plus petit. Il va m’en imprimer un nouveau plus adapté.

D’après mon fils, le masque a couté 1.80 euros en matière plus deux heures d’utilisation de son imprimante à filament soit environ 0,17 euros. Allez, on va arrondir tout ça à 2 euros sans parler des deux bières offertes. Une très bonne affaire, surtout que la bière était très bonne.

Par contre, vu la météo de ces derniers jours et celle à venir, impossible de tester le masque, le nouvel oculaire réticulé et les filtres planétaires récemment achetés. Je piaffe d’impatience de pouvoir sortir à nouveau le télescope pour réaliser de nouvelles images de meilleur qualité. En attendant, voici mes derniers essais qui ne demandent qu’à être améliorés, l’amas M 37 en haut et la galaxie M 82 en bas.