Après trois semaines de pluie

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Après la canicule du mois de juin, juillet a été des plus arrosé en Alsace.

Le week-end c’était lecture et séries TV emmitouflé dans un pull pour luter contre la froidure. Impossible d’entretenir le jardin sous les averses orageuses ou d’aller se promener en montagne.

En semaine c’était pantalon de pluie et kWay pour aller au travail à vélo.

La nuit des étoiles est tombée à l’eau et le télescope n’est pas sorti une seule fois après la fête nationale.

La première fenêtre astro à se présenter fut un soir de pleine lune, après un aller-retour à Lyon en camionnette, autant dire les pires conditions pour faire de l’astronomie. Pourtant je suis monté, avec la lunette et le télescope, histoire de réaliser des observations visuelles pendant que je photographiais le ciel.

Je suis monté très tôt afin de profiter de la fraîcheur et observer le soleil. Sur le parking il y avait pas mal de monde dont Philippe, un astronome en culotte courte tatoué de partout, équipé d’un petit télescope Skywatcher 150/750 sur une mini monture azimutale. C’était sa première au Champ du Feu. Il était excité comme un pou avec plein de questions de débutant auquel j’ai tenté d’apporter tant bien que mal des réponses.

J’ai installé mes deux instruments et pointé le télescope vers le soleil, histoire d’observer l’astre qui nous prépare des températures records pour cette semaine. Il était comme d’ordinaire, jaune avec quelques rares tâches noires. Presque décevant lorsque l’on considère que la température va monter à 37 degrés sous abri. Mais est-ce bien le soleil le coupable ?

La nuit est arrivée très vite entre les conversations, une bière partagée, les réglages des instruments et le repas au coucher de soleil. De nombreux promeneurs étaient montés comme moi profiter de la relative fraîcheur et du magnifique paysage. Du coup, pas mal de curieux nous ont accompagné une partie de la nuit.

Mon camarade Clovis est arrivé vers 22h avec son Newton rangé sur un chariot qu’il a conçu sur mesure. En cinq minutes, le télescope était sorti de la voiture et installé sur sa monture. Impressionnant ! Par contre, suite à une mauvaise configuration réseau de son ordinateur, il a quelque peu galéré pour utiliser son setup. De toute manière il était monté sans avoir planifié ce qu’il photographierait cette nuit.

Moi non. Tout était décidé depuis presque un mois. Et je n’en pouvais plus d’attendre. À 23h ma lunette prenait les premières images de la Trompe d’Eléphant dans la constellation de Céphée, ma cible photographique de la nuit. Pendant ce temps je pointais les bec le second instrument la lune qui déjà dessinait nos ombres sur le parking. Puis une fois rassasié, je laissais les badauds observer notre satellite à leur tour en prodiguant quelques explications.

L’un d’entre eux m’a servi l’habituelle théorie complotiste de la Lune inviolée par l’homme. Des fois je ne comprends vraiment pas les êtres humains. Six missions ont déposé des équipages américains sur le sol lunaire, films et photos à l’appui. Des dizaines de milliers de personnes assistèrent au décollage des fusées Saturn V et des kilos de pierres ont été rapportées sur Terre. Pourquoi un tel aveuglement ? Bon, je suis resté poli, mais je lui ai quand même expliqué que tout ça c’était des conneries conspirationnistes.

C’est lorsque Jupiter émergea des arbres qu’il y eut le plus de queue devant le télescope pour observer la planète aux anneaux. Pendant ce temps, la lunette poursuivait tranquillement ses clichés juste à côté sans rencontrer un seul problème technique, un vrai miracle !

Peu après minuit, les curieux sont allés se coucher. Il ne restait plus que les astronomes amateurs et leurs instruments pointés vers les étoiles. Nous avons continué à admirer Saturne, l’amas d’Hercule, la galaxie d’Andromède, la nébuleuse de la Lyre et celle de la cloche pour passer le temps jusqu’à ce que j’ai accumulé plus de trois heures d’images de la nébuleuse.

Le vent s’était levé, je commençais à accuser le coup de la fatigue accumulée ces derniers jours et il aurait fallu que je procède au retournement de méridien pour continuer la session photo. J’ai préféré remballer, tout comme Clovis qui finissait d’imager Saturne.

Deux jours plus tard, je suis remonté au Champ du Feu. Jupiter et Vénus seraient en conjonction à moins de 1 degré peu avant l’aube. C’était également le maximum de l’amas des Perséïdes, mais ça je l’avais oublié. 

J’avais aménagé la voiture en camping car pour pouvoir me reposer un peu durant la nuit car un 22h – 5h30 après une journée assez active ça fatigue quand même.

Le parking était presque rempli, à tel point que j’ai eu du mal à trouver un emplacement pour m’installer. Je suis tombé entre une famille de trois générations alsaco-stupide-facho et un astronome amateur qui n’avait pas sorti son télescope depuis un an. Moi je n’avais amené que ma lunette cette fois pour photographier la Nébuleuse du Sorcier, un de mes objectifs de l’été.

Après avoir lancé ma session photo qui va durer plus de 5h30 avec un retournement de méridien, envoyé bouler poliment deux fois la famille alsacienne qui venait poser des questions vraiment crétines en plein dans les réglages, je suis allé voir mon voisin qui reprenait ses marques avec son tube de 250 mm. 

Un peu sur ses gardes au début, il s’est détendu lorsque je lui ai prêté un filtre pour  observer la Lune. Après il m’a laissé regarder dans son instrument et même pointer quelques objets.

Dès le premier coup d’œil à l’oculaire j’ai constaté que son instrument était mal collimaté (l’alignement entre le miroir principal et secondaire). Alors ensemble nous avons réglé son tube et ensuite nous avons profité des merveilles de Saturne et des amas globulaires, sa passion.

Vers une heure, un groupe de jeunes s’est joint à nous pour regarder les étoiles, émerveillés par le spectacle, alors que la Lune gâchait un peu la fête.

Une majorité de personnes ne lève jamais les yeux au ciel la nuit, encore moins dans un lieu sans éclairage public. Quand ils le font, ils découvrent soudain la beauté de l’univers mais hélas l’oublient bien vite pour retourner à leurs écrans minuscules alors que la voûte céleste est infinie.

Ils sont partis vers 3h comme mon voisin. Sur le parking il ne restait qu’un camping-car, moi et un télescope parqué près d’une voiture dans laquelle son propriétaire dormait à poings fermés.

Alors j’ai fait pareil, une petite sieste réparatrice dans le coffre de la 2008 en attendant que Vénus et Jupiter ne se lèvent. Difficile de dormir dans ces conditions mais j’étais au moins au chaud. 

Lorsque les deux planètes ont enfin émergé de la cime des sapins, j’ai arrêté de photographier la nébuleuse du Sorcier pour pointer la lunette sur les deux lumières qui rentraient tout juste dans mon champ. Un magnifique spectacle !

Vers 5h j’ai remballé le matériel et suis redescendu en plaine d’Alsace où il faisait nettement plus chaud.

Je suis remonté une nouvelle fois cette nuit pour prendre le frais et photographier la nébuleuse Dumbell dans la constellation du Petit Renard. Ça ne s’est pas passé sans difficulté, un problème avec une option de l’Asiair, du coup pour obtenir mes deux petites heures d’images, je suis rentré à 4h du matin.

Mais hélas, la fin de mes vacances approche. J’aurai passé presque plus de temps éveillé la nuit que le jour. J’espère encore monter au Champ du Feu avant de reprendre le travail histoire de photographier une autre nébuleuse. La météo décidera du jour.

Si vous voulez en voir plus, mes photographies astro sont publiées ici.

Indice Kp

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Le samedi 11 mai 2024 vers 1h locale, l’indice Kp atteignait sa valeur maximale théorique à savoir 9.0. Le soir même, grace au médias, les routes des Vosges, les parkings situés en altitude connurent une affluence record pour un jour sans neige.

Coïncidence du calendrier, c’est ce même soir qu’avait choisi la SAFGA pour monter au Champ du Feu pour sa rencontre astronomique annuelle. Pour la première fois, la nouvelle équipe de chauffeurs sortait le télescope de 600 mm de son garage pour une nuit d’observation.

Au volant du 25 m3 de 3.5 tonnes je n’en menait pas large sur les routes tortueuses et étroites conduisant aux sommets vosgiens. Les ruelles des villages, les ralentisseurs, les chicanes, les tracteurs et quelques mauvais choix d’itinéraire transformèrent une heure de route en une épopée épique.

A notre arrivée, de nombreux instruments astronomiques se dressaient sur le parking, déjà pointés vers un soleil radieux particulièrement en forme. De nombreux bados s’étaient également confortablement installées près des astronomes amateurs avec leur picnic, assis sur des chaises pliantes pointées vers le Nord.

Une fois la camionnette stationnée sur le parking déjà bien rempli et le six cent sorti et assemblé, les choses sérieuses purent débuter : l’apéritif organisé par l’association…

Le temps de boire une bière agrémentée de quelques cacahuètes (il est dit que les arachides sont des protéines incomplètes parfaitement équilibrée par la présence du houblon), la nuit tombait et commençait alors un étrange spectacle.

Des centaines de voitures, tout feux allumés, musique à fond, arrivaient par grappes, tentant de trouver une place de stationnement sur un parking bondé. Cela donnait une impression de fête foraine ou de bord de plage en plein été avec tous ces gens absolument pas équipés pour une nuit d’observation débarquant dans notre havre astronomique.

La route se transforma vite en parking improvisé et le parking en voie de délestage. Les curieux commencèrent, telle une marée humaine à nous envahir et poser des questions : vous avez vu une aurore, dans quelle direction faut-il regarder, ça commence à quelle heure, c’est quoi une aurore exactement, vous faites quoi avec vos appareils ? Bref un chaos bon enfant mais guère propice à l’observation du ciel.

Malgré un indice Kp de 8.4, nous n’avons vu que de timides draperies presque incolores dans le ciel. De guerre lasse, les touristes auroristes désabusés sont redescendus vers minuit rêver d’ours polaires en extinction et de banquise fondue.

Nous, nous avons pu débuter les observations plus sereinement : la lune, la galaxie du tourbillon, le sombrero, la comète Tsushichan-ATLAS, l’aiguille et plein d’autres objets magnifiques dans l’oculaire d’un télescope exceptionnel.

Nous n’étions plus qu’une poignée vers quatre heure du matin quand sagement nous avons décidé de remballer le matériel. Le soleil se levait juste lorsque nous sommes rentrés à Strasbourg après avoir rangé l’obsmobile dans son hangar. Après je ne sais plus. J’ai dû m’endormir heureux. L’indice Kp n’était plus que de 1.67 lorsque je me suis réveillé.

Insomnia

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Les vacances c’est fait aussi pour s’autoriser quelques folies comme par exemple passer des nuits blanches sous les étoiles.

Dimanche soir, alors que le mercure bouillait en plaine, j’ai pris la route du Champ du Feu, misant sur une fenêtre de ciel clair assez large.

Avec les nuits qui rallongent, je peux arriver sur place dès 20h30. Le temps de mettre le télescope en station, la nuit est déjà là et les premières observations peuvent commencer.

Sur la route près du village de Ottrot, j’ai croisé un renard curieux et en haut, au Champ du Feu, je suis tombé sur de nombreux astronomes amateurs. Il y avait deux Newton, un Cassegrain Schmidt, un Dobson et deux marcassins.

J’étais monté pour faire de longues séries d’images : un filé d’étoiles et du ciel profond. J’avais donc prévu un siège pliant en prévision des longues attentes. Car pendant que le Nikon travaille, il n’y a rien d’autre à faire qu’admirer le ciel.

Mon voisin le plus proche avait un énorme télescope Dobson équipé d’un miroir de 400 mm. Un instrument très particulier puisqu’il ne dispose d’aucune monture et qu’il faut le pointer vers les étoiles à la main. 

Après une mise en station minutieuse, avoir lancé ma première série de photographies sur la nébuleuse planétaire de la Lyre et un filé d’étoiles centré sur la polaire, j’avais une demi-heure à tuer alors je suis allé rendre visite à l’heureux propriétaire du Dobson. Un télescope acheté sur le Boncoin pour une misère, un magnifique instrument très lumineux équipé en plus d’oculaires à grand champ. 

Bref, ce que j’ai pu contempler dans don oculaire m’a ébloui comme les dentelles du cygne ou la nébuleuse Oméga. 

Pendant que je faisais de l’astronomie visuelle avec mon voisin, le Celestron continuait à photographier le ciel profond,  la galaxie M 51 des Chiens de Chasse et justement la nébuleuse M 17 du Sagittaire.

M 51

Lorsque Saturne et Jupiter furent assez hauts dans le ciel nous sommes passés au planétaire avec même un passage par Neptune. Nous sommes revenus au ciel profond avec la nébuleuse du Clown, la galaxie d’Andromede, l’amas M 15 et bien d’autres objets encore. 

Lorsque mes trois cent clichés furent terminés, j’ai démonté le boîtier photo et nous avons utilisé le Celestron avec les oculaires grand champ de mon voisin. Maintenant, je sais ce que je vais m’offrir à Noël. 

M 17

C’est là que l’heureux possesseur du Dobson m’a parlé du passage de IO devant Jupiter vers 4h du matin. Je pensais être couché depuis longtemps lorsque cela se produirait mais en réalité, il était déjà 3h30 du matin. Alors je suis resté admirer l’incroyable passage du satellite devant sa planète avec son ombre portée pas loin de la tâche rouge.

M 31

Après avoir démonté mon setup, salué tout le monde, je suis redescendu vers la plaine, profiter des dernières heures fraîches de la nuit. A 5h30 j’étais sous la couette. A 6h30 je buvais mon café. A 7h00 je commençais à développer mes photographies. Du coup, le livre lundi soir, je ne suis pas remonté dans les Vosges. J’ai attendu vingt-quatre heures avant de repartir.