Polaris – Fatalism

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Après Voyager, on repart au pays des kangourous pour découvrir le groupe Polaris et son dernier album Fatalism.

Le quintet de metalcore australien œuvre depuis 2012 avec seulement trois albums studio à leur actif : The Mortal Coil en 2017, The Death Of Me en 2020, Fatalism l’an passé sans parler de leurs deux EPs en 2015 puis 2016.

En fait de metalcore, Fatalism joue plutôt dans la cour du metal progressif malgré une fâcheuse tendance à crier très fort.

C’est la pochette en trichromie qui m’a tout d’abord interpellé. Des silhouettes d’hommes progressent péniblement dans la neige, suivant leur leader qui s’avance vers un précipice, brandissant un fumigène écarlate. 

Fatalism est formaté comme un album commercial, onze titres radio pour trois quart d’heure de tabassage. Car si les morceaux possède un je ne sais quoi de très accessible par moment avec des refrains accrocheurs et des passages mélodiques, ça n’en reste pas moins très metal comme dans ‘Inhumane’ ou ‘Parasite’. Les guitares donnent des coups de boutoir pour appuyer une batterie sèche comme trique alors que le chant écartelé s’apparente à une scéance de torture. Alors bon, si vous n’aimez pas le metal, ça risque de piquer un peu.

‘Overflow’  aux claviers très électros, au chant sage et au refrain commercial, fait figure de douceur ici même si Jake gueule un peu de temps en temps.

Même chose pour ‘Crossfire’, qui malgré une rythmique bien dense et pas mal de hurlements, possède une écriture très accessible qui pourrait séduire les ménagère faisant leurs courses. (Je précise tout même ici, pour calmer toutes les accusations de sexisme, qu’à la maison c’est moi qui fait, les courses, le ménage aussi, les poubelles et le reste… bref.).

Et que dire de ‘Aftertouch’, le slow de l’album, parfait pour emballer une gothique au Hellfest ?Un titre qui commence de manière suave et qui se poursuit dans des hurlements.

Polaris joue d’une musique schizophrène à souhait, technique, violente et chargée d’émotions contradictoires, le genre de truc qui me fait grimper au rideau et réduit ma consommation de tranquillisants.

Je ne peux que vous recommander ce magnifique album. Il est disponible sur Bandcamp pour vous en faire une petite idée avant de vous jeter de la falaise.

Soen – Atlantis

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Je connais le groupe Soen depuis leur premier album Tellurian sans avoir jamais eu l’occasion de les écouter en live. Ils sont pourtant passés il y a peu de temps à la Maison Bleue à Strasbourg, mais je n’étais hélas pas en état de me déplacer ce jour-là.

Atlantis, leur dernier album, semblait l’occasion idéale pour les faire jouer dans notre salon. Un live studio enregistré avec un pianiste, un quatuor à cordes, deux choristes et une contrebasse. Treize morceaux de leur répertoire et une reprise revisités en version musique de chambre et metal dans une atmosphère intimiste.

Le groupe s’est réuni avec huit artistes supplémentaires dans les studios Atlantis Grammofon en Suède le 10 décembre 2021 pour capturer cet événement, donnant naissance à un CD, un DVD et des vinyles.

Sorti du morceau ‘Snuff’ du groupe Slipknot, on retrouve ici des titres de Lykaia, Cognitive, Lotus et Imperial.  Seul l’album Tellurian semble avoir été délaissé.

Des tubes du groupe joués en live mais pas enregistré d’une traite comme pour un vrai concert avec du public. On peut facilement imaginer qu’ils n’ont conservé ici que les meilleures prises.

Lumière chaudes, plans variés, je découvre le groupe dont un des guitaristes, Codi Lee Ford, me fait penser à Aragorn du Seigneur des Anneaux et la première violoniste du quatuor, Karin Liljenberg, à Tauriel, l’elfe de The Hobbit. Il y a même mon voisin déguisé en bassiste et l’autre guitariste, Lars Enok Ahlund qui ressemble à un viking, à moins qu’il ne soit vraiment un viking.

Joel, assis sur son tabouret, très concentré, face au microphone suspendu au plafond, doit se faire violence pour ne pas bouger. Il ne semble pas très à son aise avec la caméra qui le photographie en gros plan mais sa voix magnifique n’en est absolument pas affectée.

Sorti du viking chef d’orchestre qui passe sans cesse de l’acoustique à l’électrique puis au piano, les autres musiciens sont comme le chanteur, impassibles, concentrés sur la musique extraordinaire jouée ce jour-là dans les studios Atlantis.

L’équilibre entre metal progressif et musique de chambre frise la perfection grâce au travail de David Castillo. Rien à voir avec un Marillion With Friends par exemple. Atlantis est le genre d’album que l’on fredonne pendant plus d’une heure sans s’en rendre compte. Des morceaux comme ‘Monarch’, ‘Modesty’, ‘Illusion’, ‘Fortune’ ou ‘Lotus’ me nouent la gorge. A la base, il s’agissait déjà de pièces sublimes, mais là, revisitées avec des instruments à cordes, elles deviennent inoubliables.

Atlantis a éclipsé de nombreux albums arrivés à peu près au même moment. J’ai même délaissé le dernier Threshold pour l’écouter. Un album parfait pour découvrir la musique de Soen, pour les voir sur scène et un disque indispensable pour toute personne qui apprécie déjà le groupe.

Un magnifique cadeau de Noël à placer sous le sapin.

Evergrey – A Heartless Portrait

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Evergrey est longtemps resté pour moi un groupe de metal prog de seconde zone avant qu’ils ne sortent The Atlantic en 2018 confirmé trois ans plus tard par Escape of the Phoenix.

Je reconnais que cet engouement tient beaucoup au pathos et à la voix de Tom qui officie également dans le groupe Silent Skies que mon épouse adore, mais elle c’est pour le pianiste.

Malgré cet engouement, je ne me suis pas offert A Heartless Portrait en vinyle cette fois. Non pas que j’ai de oursins dans mes poches mais que le premier extrait de leur nouvel album ne m’a pas emballé outre mesure.

Le digipack trois volet aux couleurs cyan et sang est entre mes mains avec son livret assez épais. Une créature mythologique ailée semble veiller sur un monde et ses deux satellites à moins qu’elle ne cherche à les détruire. L’explication se trouve peut-être dans les textes.

A Heartless Portrait ce sont dix morceaux très musclés où la batterie de Jonas ne se pose presque jamais, où les guitares d’Henrick et Tom déchirent les éthers et où les claviers de Rikard fusent telles les flammes d’un chalumeau à acétylène. 

Techniquement, il s’agit d’une grosse tuerie de cinquante minutes qui ne vous laisse pas beaucoup d’espace pour souffler sauf peut-être dans ‘The Great Unwashed’ au solo de folie ainsi que dans le final ‘Wildfires’ nettement plus apaisé et mélodique.

A Heartless Portrait porte bien son nom. Les grands écarts instrumentaux et l’émotion à fleur de peau de sont pas vraiment au rendez-vous cette fois. C’est un album assez froid et technique dans son ensemble. 

De la double pédale parkinsonnienne, des cris de galériens débordant de testostéronne, ‘Save Us’ donne le ton de l’album. Ça sent l’homme et le déodorant sans aluminium. ‘Midwinter Calls’ donne dans le péplum metal. Alors poussez les potards au maximum pour faire trembler les murs.

Malgré tout cela, Evergrey reste mélodique grâce à la voix de Tom et les claviers de Rikard. Des touches électros virtualisent ce metal prog très viril et les soli de guitares, comme dans ‘Ominous’ feront grimper au rideau les fondus de six cordes. Une tendance forgeron amorcée dans escape of the Phoenix qui prend ici sa pleine puissance.

Ça cogne, ça tape, ça pleure, ça chante, un déferlement musclé parfaitement contrôlé façon chœurs de l’armée rouge.

La production aurait pu bénéficier de plus d’attention, non que ce soit épouvantable, mais disons perfectible. Il faut pousser le volume assez fort pour faire ressortir la dynamique de la bête.

Bon, vous l’aurez compris, A Heartless Portrait ne sera sans doute pas mon Evergrey préféré. N’empêche, c’est une belle machine de guerre metal progressive qui en live pourrait révéler tout son potentiel et que j’écoute très régulièrement depuis sa sortie.

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