De bonnes raisons de mourir

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Le même jour, je me rendais chez mon libraire, L’Ill aux Trésor, pour commander deux livres aux titres évocateurs : « Derniers mètres jusqu’au cimetière » et « De bonnes raisons de mourir », tout un programme. Le premier était pour mon épouse, le second pour moi. Mais rassurez-vous, nous allons bien.

C’est en lisant le blog de Gruznamur que j’ai eu envie de me plonger dans le livre de Morgan Audic. Un polar se passant dans les environs de la centrale de Tchernobyl avait tout pour me séduire. Car oui, je l’avoue, l’accident nucléaire de 1986 m’a toujours fasciné. Tchernobyl et Pripyat ont inspiré bien des artistes, Steve Rothery avec l’album The Ghosts Of Pripyat, Philippe Luttun et son The Taste Of Wormwood ou la bande dessinée de Emmanuel Lepage, Un Printemps A Tchernobyl.

Un meurtre sordide se produit dans la ville fantôme de Pripyat. Deux enquêteurs sont sur l’affaire, un privé à qui son médecin lui laisse peu de temps à vivre, un milicien en poste à Tchernobyl qui espère retrouver un poste à Kiev, loin des radiations.

Norgan Audic nous livre un polar écologique haletant sur fond de guerre du Donbass dans les paysages irradiés de Tchernobyl. Nous rentrons dans la zone d’exclusion de la centrale nucléaire, ses villages en ruine, ses dangers, ses mystères, nous découvrons l’Ukraine de l’après chute du mur de Berlin et un tueur assouvissant une terrible vengeance.

Pour tout vous avouer, plus que l’intrigue, ce sont les décors qui m’ont passionné dans ce livre, cette description de l’Ukraine contemporaine, cette guerre du Donbass dont les médias parlent assez peu et cette catastrophe nucléaire qui aura tué directement et indirectement des milliers de personnes et qui continue aujourd’hui de décimer la population. Visiter les ruines de Pripyat en compagnie des enquêteurs, rentrer dans des immeubles évacués en urgence par la population, découvrir le récit, même imaginaire, de ceux qui ont survécu, rencontrer des personnes revenues vivre dans la région irradiée, découvrir toute l’horreur de ce drame, voila la force de ce roman.

Mais n’oublions pas l’intrigue, car elle est consistante. Des meurtres se produisent à Pripyat, des corps mis en scène avec minutie, des victimes toutes reliées entre elles par cette nuit du 26 avril 1986 où le coeur du réacteur n°4 à fusionné. Les personnages de Morgan possèdent beaucoup de force, Melnyk, l’ancien milicien travaillant dans la zone, Rybalko l’enquêteur, né à Pripyat, à qui il ne reste que quelques mois à vivre, Ninel, l’ornithologue écologiste, Sokolov, l’ancien ministre corrompu, prêt à tout mettre en oeuvre pour éliminer le tueur.

Ne manquez pas ce livre, il est passionnant et palpitant.

Outresable

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Certains écrivains trouvent d’étonnantes idées : un puit refuge enfoui pour protéger toute une population, une balise spatiale et son gardien de phare, un plongeur des sables à la recherche de trésors.

Hélas une idée ne suffit pas toujours à un roman, il faut également une histoire. Le dernier livre de Hugh Howey décrit une terre de sable désolée, des plongeurs qui descendent sous les dunes piller les vestiges d’une civilisation déchue et une famille unie par la même souffrance, celle d’un père parti un matin, sans prévenir. L’univers d’Outresable réinvente, après Dune, un monde hostile, dominé par le soleil, le sable et le vent, où l’eau comme les anciens objets du vingtième siècle sont des denrées précieuses. Une mère, une sœur, trois frères, tous survivent à leur manière dans le désert, à l’abri du mur sur lequel jadis ils ont vécu. 

Malgré un monde prometteur, le récit se dilue rapidement et nous conduit vers une fin prévisible et l’insistance de l’auteur pour nous faire comprendre que le sable règne en maître sur la terre devient pesante au fil des pages. 

Outresable propose un univers intéressant pour le Jeu de Rôle mais ne suffit pas à en faire un bon roman. Hugh aurait limité son récit à la plongée de Palmer jusqu’au gratte ciel, cela aurait donné une excellente nouvelle, un peu comme celle qu’il avait écrit d’abord pour Silo. Howey possède sans doute suffisamment de matière comme pour Silo afin d’écrire une suite, mais ce serait à n’en pas douter une bien mauvaise idée.

Au fait, si, vous voulez partager vos chronique littéraires comme moi, je suis également sur Babelio.

Le géant enfoui

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Un couple, à l’automne de sa vie, décide de quitter son village pour aller saluer leur fils qu’il n’ont pas vu depuis très longtemps. Ainsi débute l’étonnant roman de Kazuo Ichiguro, un japonais vivant aujourd’hui en Grande Bretagne.

Voici un singulier roman, celui d’un auteur que l’on m’avait recommandé, un livre qui m’a demandé beaucoup de temps à terminer. Un roman sur l’oubli, à mi chemin entre le récit fantastique, le roman de la table ronde et l’essai philosophique.

Axl et Béatrice, qui vivaient dans des galleries, sans lumière la nuit pour les éclairer, partent, malgré leur grand age, à la recherche de leur fils perdu. Traversant des contrées sauvages, peuplées de monstres, ils rencontrent un guerrier Saxon, un chevalier de la table ronde, des moines, des villageois, qui tous, comme le vieux couple, souffrent d’un étrange mal, celui de l’oubli.

La plume de Ichiguro est sublime, un style étrange et envoûtant qui vous entraîne dans ce lent voyage quasi initiatique qui conduira le couple aux portes de la vérité. Les mythes se mélangent de cette histoire, l’auteur parle de la guerre entre les saxons et les bretons, aborde les légendes de la mort, parle d’Arthur, de Brennus et nous fait visiter une Grande-Bretagne, celle du haut moyen-âge, imaginée par un japonais, avec ses propres références mythologique.

Si j’ai peiné à avancer dans le récit, c’est qu’il ne s’y passe pas grand chose au final, que les dialogues sont lents, répétitifs, que l’idée que développe Ichiguro met beaucoup de temps à se dévoiler au grand jour et surtout parce que je peinais beaucoup à rester concentré sur un livre.

J’ai cependant beaucoup aimé ce livre, son histoire, ses enseignements, le style de l’auteur, et je suis certain que je reviendrai prochainement sur ces autres romans. Si vous aimez les belles plumes, les contes, les voyages et les récits initiatiques, je vous recommande ce Géant Enfoui. Un très beau livre.

Entends la nuit

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Une jeune femme jongleuse de rue, quitte la vie qu’elle aime et son squatt à Amsterdam pour aller vivre chez sa mère et travailler dans des bureaux à Paris. Ainsi commence le roman de Catherine Dufour, Entends La Nuit. 

Je l’avais emprunté sur un malentendu, ayant lu au dos du livre les mots datamining, veille de réseaux, bref des trucs pour geek. Le roman aborde bien des sujets, mais aucun de ceux évoqués plus haut. 

Myriame, l’héroïne, prend son nouveau poste dans une étrange société et plonge dans l’univers impitoyable du travail avec les collègues, les petits chefs, les grands patrons, les intrigues de pouvoir, les sorties et la vie parisienne. Retourner vivre chez sa mère faute d’un salaire décent pour s’installer ailleurs, s’installer dans un bureau humide truffé de problèmes électriques, supporter sa nouvelle chef de service, se faire espionner en permanence par le tchat d’entreprise et gérer des dossiers immobiliers ennuyeux à mourir, Myriame commence sa nouvelle vie parisienne.

La première moitié du roman est intrigante, je l’avoue, d’autant qu’apparaît alors un mystérieux et beau personnage, quasi virtuel, qui lui offre le CDI inespéré ainsi qu’un appartement d’un autre âge après lui avoir sauvé la vie.

Puis le récit bascule dans un sous Twilight. Déjà que Twilight, ça ne cassait pas des briques, alors que dire de la seconde partie de Entends La Nuit qui est juste affligeante. Myriame rencontre un être surnaturel, tombe amoureuse, veut devenir comme lui. Sa vie est soudain menacée, elle plonge dans les merveilles et les horreurs de cette existence non humaine… Un copier coller du premier tome de la saga de vampires sans l’exotisme et sans que l’on parle de buveurs d’hémoglobine.

Ici le roman parle de chair et de pierre.

Je suis quand même allé jusque la dernière page par curiosité. Surtout ne commettez pas cette erreur, relisez plutôt Twilight. Oui je sais…

L’influenceur

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Je possède un avis sur tout, film, bande dessinée, livre, jeu vidéo, album, exposition, concert, politique, matériel photo, matériel audio, technologie, science. Donnez-moi un mixeur, je vous le chroniqurai. J’ai interviewé les plus grands, j’ai tutoyé les plus célèbres, je suis prêt pour une heure de tête à tête avec Trump. Sur YouTube, Facebook, Twitter, dans mon blog, mon webzine, sur Flickr, je partage mes gribouillages, communique ma passion, donne mon avis, critique, raconte…

Je suis un influenceur, c’est ainsi que l’on nous appelle. Mes écrits, mes vidéos modifient le comportement d’achat de mes followers. Ils veulent être moi, s’habiller comme moi, boire la même boisson que moi, conduire la même voiture que moi.

Un photographe m’immortalise dégustant une bière tout en écoutant le dernier vinyle de pop. Gros plan sur la cannette mousseuse et sur le nom du groupe, mon visage en second plan, celui que tout le monde le connaît, avec ce sourire béat. Shooting dans un jacuzzi remplit de champagne et de jeunes filles dénudées, sur le pont d’une croisière musicale, interviewant la rock star du moment.

Les marques s’arrachent mes espaces publicitaires. Les grands fabricants audio se battent pour que j’écoute la musique sur leur matériel hifi. Je suis le VIP des soirées de rock, les tourneurs déroulent le tapis rouge, me couvrent de cadeaux. Les plus belles chanteuses rêvent de partager, ne serait-ce qu’une nuit, mon lit à baldaquin. JC, mon JC, Oui , Oui, Ouiiiiiiii !

Nut ! Nut ! Nut ! Le réveil sonne, il est six heures, je dois me lever pour aller bosser. Aujourd’hui il faut changer les pneus de la flotte de Clio, commander du PQ, préparer la grande salle pour une réunion et briefer la femme de ménage sur l’utilisation de la serpillière. A 17h, s’il me reste un peu d’énergie, j’écouterai les fichiers mp3 reçus et transcrirai l’interview téléphonique d’un obscur groupe de prog en buvant un verre d’eau du robinet. Je regarderai une vielle série télé puis me battrait pour un peu de couette avec ma femme dans ma vieille maison qui tremble au passage des bus.

Je suis un influenceur, j’ai une chaîne YouTube que personne ne consulte, une page Facebook désertée, un blog confidentiel, un webzine avec moins de cinq cent pages vues par jour et un Flickr rempli de photos moches. Je suis un influenceur qui n’influence personne, n’intéresse aucun annonceur, ne vend aucun alcool, vêtement et cela me va très bien. Pour le jacuzzi, j’ai une baignoire. Et pour les bulles, devinez…

La Vérité

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Il y a quelques années, une de mes nièces adorées, nous avait offert et dédicacé un roman, La Vérité Sur L’Affaire Harry Quebert, un thriller, une histoire d’amour, un roman dans le roman du roman, un livre parlant d’écriture, d’artistes, bref un petit chef d’œuvre. 
J’avais dévoré le pavé et lu depuis quelques autres romans de l’auteur à succès. 

Aujourd’hui, c’est la série télé tirée du roman qui a accaparé mes soirées. Dix épisodes pour raconter la disparition de Nola, la folle histoire d’amour interdite entre un homme mûr et une gamine de quinze ans, la genèse d’un live à succès, l’automne 1975 de Sommerdale et comment l’élève surpasse le maître à la fin.

Lorsque vous lisez un roman, vous construisez vos propres images des paysages, des visages et quand l’œuvre devient visuelle, il est rare que l’on ne soit pas déçu. Millénium et Le Seigneur des Anneaux sont, pour moi, les rares livres à avoir très bien supporté la transformation, du papier à la pellicule. 

La série dont je vous parle m’a tout d’abord mise mal à l’aise avec ce jeune écrivain manquant de profondeur et la belle ingénue un peu mièvre. Mais épisode après épisode, le choix du casting s’est imposé à moi finalement, dévoilant des facettes des personnages qui ne m’avaient pas forcément sauté aux yeux en lisant le livre, comme le vieil écrivain lâche, son jeune élève qui se montre bien plus digne qu’il ne semblait l’être au préalable. La série apporte, tout en respectant scrupuleusement le roman, un nouvel éclairage sur cette terrible histoire. 

Par chance, j’avais oublié les détails de l’intrigue et me suis fait happer encore une fois dans les derniers épisodes.

Si Joël Dicker est un grand écrivain, Jean-Jacques Annaud est un grand réalisateur. Je vous recommande de lire le livre, de laisser passer quelques temps, puis de regarder la série télé, puis de relire le livre une nouvelle fois.

Le monde à l’envers

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La planète ne tourne définitivement pas très rond. Aujourd’hui ce sont les musiciens qui interviewent les critiques. Mais où va-t-on ?

Guillaume, l’artiste qui se cache derrière The Odd Gallant, m’a contacté pour réaliser une interview du webzine Neoprog alors que j’aurai du, si j’en avais eu le temps, en réaliser une de lui, pour parler de son dernier et génial album Official One.

Ou comment flatter l’ego d’un chroniqueur prétentieux en le caressant dans le sens du poil pour s’assurer une prochaine bonne critique. Malin le Guillaume.

Lorsque les questions sont arrivées, j’ai eu immédiatement envie d’y répondre, mais ma chérie voulait se promener en forêt. Cruelle épouse. Elle sait bien pourtant que lorsque je reçois un paquet, il faut que je le déballe tout de suite. Une heure de supplice, à préparer des réponses dans ma caboche en marchant sous la frondaison avant de pouvoir coucher mes pensées sur le papier. Oui, je l’avoue, j’adore me raconter.

J’avais prévenu Guillaume, mes réponses ne seraient pas forcément consensuelles ni politiquement correctes. Cela n’a pas semblé le déranger un seul instant, alors je me suis lâché, vraiment, un pur bonheur, encore mieux que dans le blog. Le rock progressif français a sans doute été quelque peu égratigné au passage comme certains tourneurs, mais bon, peut-être est-ce mérité.

Ce n’était pas la première fois qu’un artiste me posait des questions sur le webzine, curieux de connaître son fonctionnement, ce qui m’a amené à cela, comment nous fonctionnons etc. Je n’imaginais même pas que cela puisse intéresser quelqu’un d’ailleurs. Mais c’est la première fois, hormis dans mes notes de blog, que cela est publié.

Les questions portaient sur le webzine, la musique, moi, le blog, vous pouvez, non vous devez aller les lire ici. C’est un peu comme un billet de blog au final, en plus dense, avec un parcours imposé par Guillaume au départ (ce que l’on appelle des questions). Ce fut une expérience très intéressante, jubilatoire même. J’ai répondu sans me poser de question, elles étaient déjà toutes rédigées, sans me censurer, je sais que tout n’est pas bon à dire, mais c’est si bon de le dire.

Pour les prochaines interviews voici les créneaux pour les phoners et Skype : 1er avril 2020 : 17h30, 18h00, 18h30, 19h30, 20h00.

Bonne lecture et merci à Guillaume !
http://theoddgallant.com/interview-de-jean-christophe-le-brun-neoprog/

Lire les étoiles dans une tempête de neige

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J’étais en panne depuis trop longtemps pour faire la fine bouche.

« j’aperçois bien des constellations au-dessus de ma tête… le cri de Sam s’est perdu dans le blizzard ». Les constellations scintilleraient pendant une tempête de neige ? Sérieusement, vous avez bien lu ? Je n’ai jamais vécu au Canada mais j’ai comme l’impression que Andrew Pyper s’est pris les pieds dans le tapis en écrivant son dernier chapître. D’ailleurs, ce n’est pas la seule coquille que j’ai relevé au cours de ma lecture.

Le Marchand De Sable Va Passer de Andrew Pyper est le premier livre que j’arrive à terminer depuis bien des semaines, un polar thriller un tantinet angoissant servi par un bon suspens, un style acceptable et une connaissance des phénomènes météorologiques approximative. Il m’aura fallu quand même quinze jours pour avaler seulement 344 pages, un score misérable.

Le Marchand De Sable Va Passer est l’histoire d’un livre qui parle d’un livre, un genre classique mais qui fonctionne toujours très bien avec moi. J’aime que les écrivains parlent de livres. En l’occurrence ici, le personnage journaliste au rebut, qui rêve de devenir écrivain mais n’a rien à raconter, vole le récit d’une autre personne, jusqu’au moment où ce récit le rattrape, lui et son fils.

Andrew Pyper maîtrise bien les atmosphères, les décors, esquisse les personnages de telle manière que l’on croit les avoir rencontré, joue habilement des peurs qui nous hantent la nuit et réussit, là où nombre d’auteurs ont échoué ces derniers mois, à me conduire jusque la dernière page du livre. De là à vous le conseiller… Bon si vous êtes en panne, pourquoi pas, mais pas dans une voiture, sous le blizzard, vous pourriez voir les étoiles.

Votez pour moi

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Avez-vous lu l’Empereur dieu de Dune, cet improbable plaidoirie pour la dictature ou L’Automne du Patriarche de Gabriel Garcia Marques. Deux livres qui parlent de tyrans et de leur solitude face au pouvoir.

Et si le totalitarisme était la solution à nos démocraties moribondes ? Quelque part, nous le voyons bien, la démocratie ne tourne pas rond. Le peuple élit des représentants qui vont les gouverner et quelques mois plus tard ils veulent les guillotiner. Que comprendre ?

Les électeurs croient-ils au miroir aux alouettes de certains, les raccourcis populistes des autres ou ne lisent-ils pas les programmes tout simplement ? Lorsque nos politiques appliquent leur programme le peuple se soulève, lorsqu’il nous enfument, le peuple ne dit mot, ou presque.

Lors des dernières présidentielles, il y avait pléthore de candidats avec des programmes très divers, du plus musclé au plus social, de virons tous ces feignants de fonctionnaires à instaurons le revenu universel pour tous.

Après le premier tour, ne restaient que deux challengers, un petit jeune promettant de changer la politique et une vieille bique voulant quitter la zone Euro. Que choisir, le  fascisme, l’autarcie ou le pouvoir entre les mains des riches ? 

La démocratie permet de choisir entre la peste ou le choléra, qu’elle chance ! J’ai voté, la mort dans l’âme, pour nous éviter le pire, je ne regrette pas mon choix même si je le paye cher aujourd’hui.

Nous aurions un dictateur éclairé au pouvoir, un despote intelligent ayant, dans un sanglant coup d’état, décapité tous les démagogues, populistes et hypocrites, pris les rênes de l’état pour mettre en œuvre une politique, sans contestation possible, avec une armée forte derrière lui pour mater tout soupçon de révolte. Nous aurions peut-être cinquante années de prospérité ou d’horreur.

Les exemples ne manquent pas dans notre histoire, Staline, Hitler, Fidel Castro, Trump et qui sait un jour peut-être, Le Pen.

Finis les flashballs pour le retour au tir à balle réelle. Aménagement du Larzac pour créer des villages de rééducation sociale, censure de la presse pour mieux communiquer vers le peuple. Torture pour faire avouer les crimes. Peine de mort pour dissuader les criminels. Épuration ethnique pour retrouver le plein emploi. Rééducation par le travail, le philosophe devient maçon. Un monde parfait, où ordre et prospérité pourraient enfin voir le jour.

Et si nous donnions plutôt le pouvoir au peuple ? Pas le communisme, il a fait ses preuves, mais la consultation systématique de la base pour gouverner. En voilà une belle idée. Les suisses en sont de grands adeptes. Quid de ce fameux RIC demandé à corps et a cris par les gilets jaunes.

En voilà une idée séduisante, mais n’y aurait-il pas un risque ?

Vague de froid sur la France, on relance le nucléaire. Meurtre d’un enfant, on ressort la guillotine. Vol commis par un migrant, on ferme les frontières. Attentat au Bataclan, on incinère tout les fichés S. Prolifération de voiles dans les rues, on interdit les minarets. Hausse des prix, on augmente le SMIC. Comment éviter les propositions de lois démagogiques, épidermiques, à chaud ?

Le peuple est-il suffisamment éduqué pour gouverner ? Non disent certains. Nos dirigeants le pensent tellement fort. Ils méprisent tellement ces « sans dents » qui les ont placés au pouvoir. Ils leur expliquent que s’ils taxaient les riches, ceux-ci partiraient. Vous les pauvres, faites donc un effort enfin, sinon vous serez encore plus pauvres. Cynisme ? Même pas. 

Et si nous sortions du capitalisme, de la démocratie ? Si nous options pour la vie des Dépossédés d’Ursula le Guin, et son improbable anarchie planétaire ? Ni maître ni loi, chacun pour soi et que le plus fort gagne. Cette dernière phrase résume quand même bien le monde dans lequel nous vivons. Les puissants semble au dessus des règles écrites pour un peuple ignorant, l’argent est le pouvoir et la force fait loi.

Finalement Leto Atréïde n’était pas un monstre, s’il brûlait les historiens c’est qu’ils ne savaient rien du passé, s’il matait toute rébellion, c’est parce qu’il connaissait l’avenir. Des siècles de pouvoir sans partage pour préserver l’humanité du grand chaos. Peut-être nous faudrait-il un tel visionnaire pour conduire l’humanité.

Alors votez pour moi…

Underground Railroad

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C’est le président Obama en personne qui m’a conseillé ce livre de Colson Whitehead. Enfin presque. En réalité c’est Steve Hackett, lui même conseillé par Obama, qui m’a parlé du bouquin. C’est déjà pas mal.

Dans son dernier album, At The Edge Of Light, figure un morceau intitulé Underground Railroad, un titre entre gospel et americana qui tranche avec le reste du disque.

Lorsque j’ai interviewé le maestro, nous nous sommes longtemps attardé sur ce morceau et c’est là que j’ai appris qu’il s’agissait d’un livre de Colson Whitehead, un livre que le président Obama avait conseillé à Steve Hackett.

Pour être tout à fait honnête, sur le coup, je n’ai pas compris que Steve parlait de Colson Whitehead, un auteur américain que j’ai découvert avec son excellent livre de 2014 sur les zombies, Zone 1, livre que je vous recommande au passage. C’est en travaillant à la retranscription de l’interview que j’ai compris qu’il parlait d’un auteur que j’aime beaucoup.

Inévitablement, aimant l’auteur, aimant le morceau, curieux d’en savoir plus sur chemin de fer clandestin, j’ai été cherché le livre chez mon libraire préféré.

Underground Railroad, raconte l’histoire de Cora, une esclave noire américaine, qui fuit sa plantation sudiste. Une sorte de road movie sur fond d’esclavagisme, roman semi historique qui donne un éclairage tout particulier sur ces heures sombres des Etats-Unis.

Comme on le découvre à la fin, dans les remerciements, Colson s’est inspiré de plusieurs récits pour écrire son livre et la narration s’en ressent quelque peu, disons que les différentes vies de Cora semblent parfois misent bout à bout assez sommairement.

Le récit commence dans une plantation, décrivant les conditions atroces dans lesquelles survivaient les esclaves. Puis vient la fuite et la chasse à l’homme, fuite qui passera par ce réseau ferré secret, l’underground railroad. Cora se réfugiera dans un foyer pour noirs, où elle travaillera comme bonne puis comme tableau vivant pour un sordide musée pour blancs. Elle restera enfermée des mois durant dans un grenier, assistant à la mise à mort des siens sur la place du village, elle connaîtra un peu de répit dans une grande exploitation de maïs avant de devoir fuir encore et encore.

Comme tout le monde, j’avais en tête quelques images d’Épinal sur la traite des noirs, le commerce triangulaire, la mortalité lors de la traversé de l’Atlantique. Je me faisais quelques films sur les plantations de canne à sucre mais je n’imaginais pas la vision d’horreur que dépeint l’auteur. Underground Railroad se lit comme un roman, raconte plus qu’un livre d’histoire, remet en question bien des idées reçues sur l’esclavagisme et dévoile un partie de cette histoire, celle du chemin de fer clandestin, qu’avant ce livre, je ne connaissais pas.

Comme le disait Steve Hackett, Underground Railroad ferait un très bon film. En attendant, il en fait une chanson.