The Dali Thundering Project – All Mighty Men – Drifting Through a Prosthetic Era

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Avertissement : si vous n’aimez pas le slam, si vous vomissez le djent, si l’indus vous donne de l’urticaire, si le growl vous fait gerber, alors passez votre chemin. Aujourd’hui ça va faire mal.

Luc, le plus ancien et le plus jeune des chroniqueurs de Neoprog – cherchez l’erreur – m’a recommandé dernièrement l’album Savages du groupe de metalcore français The Dali Thundering Concept. Comme dit justement, Luc est jeune, je pourrais être son père. 

D’ailleurs, Luc ! Je suis ton père…

Il est plein de fougue et chroniquait les promotions les plus improbables de Neoprog avec une plume acérée. J’ai essayé Savages, mais contrairement à Luc, je n’ai jamais été vraiment fougueux et ma jeunesse est loin derrière mes rhumatismes. Savages m’a semblé intéressant mais clairement trop sauvage pour mes chastes oreilles.

Cela ne m’a pas découragé pour autant, car j’adore le djent. Un soir, j’ai écouté le dernier album du groupe All Mighty, Men – Drifting Through a Prosthetic Era sorti en janvier 2022, un disque dix titres pour seulement trente-six minutes. 

L’écoute du premier morceau a suffi à me convaincre, j’ai commandé le CD, en priant pour que le reste soit du même tonneau. En réalité, la suite est encore meilleure.

Le groupe est un quatuor français qui mélange allègrement sur dix pistes djent, metalcore, slam, néo classique, électro, growl tout en parlant d’écologie en anglais. Autant dire que ça pique, surtout pour un vieux schnock comme moi. Ca pique oui, mais c’est juste génial.

La pochette représentant un visage brisé au milieu tenu par deux mains sculptées dans le plâtre a immédiatement attiré mon attention, une superbe accroche comme le morceau d’ouverture. L’album est un concept sur l’humanité, le futur et l’écologie : “God is dead, long live man, all mighty men.”.

Quatre instrumentaux aèrent le growl et le slam torturé. Le disque existe d’ailleurs également en édition instrumentale pour ceux qui n’aiment pas le chant crié. 

‘God Is Dead’, qui m’a donné envie de plonger, dans l’album explore l’électro cinématique sur un voix vocodée, virant ensuite au djent symphonique grandiloquent sur des orgues d’église avec, pour finir, des chœurs hurlés. ‘Styx’ donne dans le néo-classique au piano et violon un peu tzigane, une accalmie salutaire après le violent ‘Lost In Transaction’. ‘Serenading Silence’ propose deux minutes trente-neuf secondes de Plini avec une guitare lumineuse et des petites notes claires métronomiques. Le très court ‘Alone’ joue du cinématique à la Vangelis, des accords sombres qui sonnent dans l’immensité noire et qui vont crescendo pour ouvrir le djent de ‘Enter The Limbo’.

Et puis il y a des surprises comme le ‘Long Live Man’ qui use de slam avant de se déchirer les cordes vocales sur du métal prog djent symphonique. C’est violent, mais quelle claque ! Que dire de ‘The Sea Starts Here’ aux accents orientaux où un growl carrément caverneux, limite goret, écrase un djent metalcore avant de revenir à un rap de souk. N’oublions pas le dernier morceau, ‘Candid Monster’ au chant clair sublime, slam et musique cinématique qui conclut ces trente-six minutes spectaculaires en douceur, enfin, presque.

Nous serions encore en 2022, je vous dirais que je viens de trouver mon album de l’année, parce sincèrement, All Mighty Men – Drifting Through a Prosthetic Era est juste extraordinaire. Je ne peux que vous recommander The Dali Thundering Concept. Il est sur Bandcamp, en version instrumentale également et vous trouverez aussi Savages dans lequel je vais me replonger avec plus de sérieux.

Grima – Frostbitten

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Parmi les albums dont je ne devrais sans doute pas parler ici, il y a Frostbitten du groupe Grima. Pour quelles raisons ?

Tout d’abord, ils sont russes, et par les temps qui courent, les russes, bof quoi. Ensuite l’album s’appelle la morsure du froid, et même si l’hiver approche, cela fait un bail que je ne l’ai pas sentie cette morsure. Enfin parce que c’est Stéphane Gallay qui a acheté cet album sur Bandcamp, et rien que pour ça, il vaut mieux se méfier.

Grima est un duo de doom black metal au growl clair qui donne également dans l’atmosphérique et le folk. Déjà, le growl c’est difficile à comprendre, mais écrit avec des caractères cyrilliques, là c’est mort. Tout ce que je peux vous dire, c’est que Frostbitten parle de magie et de créatures gardiennes de la nature.

Le metal de Grima possède un côté post-rock cinématique luciférien très mélodique débordant de double pédale et de growl. Si quelques mots dans la phrase précédente semblent se contredire, leurs compositions, elles, sont très cohérentes.

L’album sept titres dure près de cinquante minutes avec deux pistes frisant les dix minutes, ‘Gloom Heart of the Coldest Land’ et ‘Winter Morning Tower’. Guitare mandoline, double pédale trépidante, accordéon et growl démoniaque, limite vomito, peuplent ce metal déchirant et mystique qui devrait effrayer plus d’une ménagère.

D’ailleurs, j’avoue que Grima ne fait pas l’unanimité à la maison. Le chat fuit du salon quand je l’écoute, ma femme me demande de couper cette horreur, mes enfants (oui ils sont encore à la maison) me regardent de façon étrange et les voisins me détestent, mais ça, ce n’est pas nouveau. Il faut dire que lorsque je l’ai écouté la première fois, je passais une semaine vraiment difficile et les seules musiques qui me faisaient du bien, étaient quelque peu extrêmes.

Frostbitten joue de grandiloquence, du mysticisme enfoui dans les tréfonds de notre âme, des terreurs anciennes tapies dans notre cortex reptilien, usant d’un folk démoniaque détourné avec des instruments metal. Si ‘Hunger God’ est un peu trop frontal, j’adore ‘Gloomy Heart of the Coldest Land’, ‘Winter Morning Tower’ qui débute à l’accordéon et le délicat instrumental ‘Mana’.

Je ne recommanderai Frostbitten qu’aux métalleux aguerris, majeurs et vaccinés prêts pour de nouvelles expériences. Grima n’en n’est pas à son premier essai puisqu’ils sévissent depuis 2014, alors si vous avez eu comme moi une semaine de merde, vous savez quoi écouter…

Luna’s Call – Void

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Pourquoi louer une ponceuse sophistiquée pour vos petits travaux lorsque vous pouvez écouter Void de Luna’s Call ? Poussez le volume à fond et en deux écoutes, votre parquet sera poncé.

C’est sur Blog à Part que je suis tombé sur la chronique papier de verre de Luna’s Call, un groupe très justement comparé à un Wilderun ou un Opeth en version caverneuse. Du metal progressif d’une très grande richesse mélodique et orchestrale au growl clairement prononcé.

La première écoute m’avait laissé dubitatif, car ne nous mentons pas, ça gueule façon glayau rauque de fin de trachéite presque tout du long de l’album. A la seconde écoute, la brosse à paille de fer est passée au second plan, derrière la musique d’une infinie richesse et j’ai acheté l’album. A la troisième écoute, je me suis dit qu’il faudrait en parler ici même si Alias en a déjà fait la retape.

L’album d’une cinquantaine de minutes livre trois longs formats et cinq titres plus conventionnels où se retrouve l’esprit d’Opeth, de Dream Theater et surtout Wilderun. Par moment cela fait quasi cover mais l’ensemble est tellement riche et foisonnant d’idées que cela ne me pose pas de problème.

D’ailleur si Void n’avait pas déjà deux ans au compteur, il figurerait dans ma liste pour le podium 2022.

D’entrée de jeu Luna’s Call fait du Opeth sur le court ‘Merced’s Footsteps’ puis également dans ‘Locus’ alors que dans les treize minutes et quelques de ‘Solar Immolation’, lorsque le growl s’efface, c’est Dream Theater qui domine la partition.

Ça ne les empêche pas de lever le pied dans ‘Enceladus & the Life Inside’ en quasi acoustique et chant clair.

Évidemment il y a des ‘In Bile They Bathe’ où l’aspirine est fortement recommandée mais c’est largement compensé par le délicat instrumental ‘Silverfish’ qui suit.

Et Wilderun dans tout ça ? L’esprit de Wilderun se retrouve dans les titres fleuves ‘Signs’, ‘ Solar Immolation’ et tout particulièrement dans ‘Fly Further Cosmonaut’ qui termine l’album.

Il n’y a pas si longtemps, j’aurai sans doute renoncé à l’écoute de Void à cause du growl. Mais depuis mon tatouage sur les fesses, je n’ai peur de rien, je bois même de la Kronembourg en pack de seize. Cet album est une tuerie, merci à Stéphane pour la découverte.