The Pineapple Thief – It Leads To This

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Bruce Soord

Et si nous faisions une petite pause avec le metal ? Parce que voilà, The Pineapple Thief vient de sortir son nouvel album It Leads To This.

Et si mon enthousiasme varie beaucoup d’un de leur disque à l’autre, j’avoue que cette fois, je suis assez emballé. Si j’aime ce groupe, c’est principalement pour Bruce Soord dont j’adore la carrière solo et pour le batteur de Porcupine Tree, Gavin Harrison.

It Leads To This propose huit titres de rock alternatif dont un ou deux s’approchent du progressif comme le magnifique ‘Now It’s Yours’, le tout en quarante et une minutes.

The Pineapple Thief - It Leads To This

La photographie qui illustre l’album m’a immédiatement séduite. L’image d’une certaine Amérique ruinée qui contraste tellement avec la volonté de se présenter comme une super puissance qui gouverne les autres nations. Un regard posé sur le monde par Bruce Soord afin d’essayer de donner du sens à la vie et ce qui nous entoure.

Les huit morceaux de quatre à cinq minutes possèdent un son rock nettement plus ricain que britannique. Des accents americana de guitares comme dans ‘To Forget’, une batterie en première approche relativement carrée et des claviers souvent en retrait.

L’album alterne habilement douceur et rock plus soutenu. Cela confère un rythme à l’écoute qui souvent a manqué auparavant à The Pineapple Thief.

La voix de Bruce est toujours douce, les claviers assez discrets sauf sur ‘Put It Right’ et ‘The Frost’, la basse est le plus souvent ronde sauf peut-être quelques notes dans ‘Every Trace Of Us’.

La batterie, d’apparence minimaliste, révèle ses finesses lors d’une écoute attentive et la guitare épouse de nombreuses formes, de cristallines à rugueuses, bluesy ou bien steel, des sonorités auxquelles Bruce ne nous avait pas forcément habitué.

Si ‘Put It Right’, qui au passage me fait penser à du Steven Wilson, ressemblerait presque à une balade au piano, ‘Now It’s Yours’ installe une atmosphère angoissante.

Par moments la guitare durcit le ton comme dans ‘Rubicon’ ou encore ‘The Frost’, quelques notes plus nerveuses qui rompent avec la douce mélancolie du chant de Bruce et dynamisent l’album tout en finesse.

Lorsque je vous avais présenté Luminescence, le dernier album solo de Bruce Soord, j’avais affirmé haut et clair que je préférais le travail solo de l’artiste à son groupe, The Pineapple Thief. Avec la sortie de It Leads To This, je suis nettement moins catégorique finalement.

L’album sera le premier à entrer dans la liste des candidats au podium 2024. S’il ne révolutionne pas la face du prog, il possède une telle beauté intérieure qu’il a conquis mon cœur.

Je réserve le 9 mars pour aller les écouter à la Laiterie à Strasbourg en priant pour qu’il n’y ait pas un Alex Henry Foster pour leur voler la vedette.

Earthside – Let The Truth Speak

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Il y a huit ans, le magazine Neoprog recevait en promotion un petit bijou signé par une formation toute jeune : le premier album de Earthside, A Dream In State.

Il aura fallu patienter cette année pour que le groupe sorte son second opus Let The Truth Speak. Une longue attente amplement récompensée.

Une des particularités de Earthside est de ne pas avoir de chanteur. Toutefois, leurs albums ne sont pas composés que de titres instrumentaux. Pour la voix, ils font appel à des pointures comme Daniel Tompkins.

Leur musique navigue entre post-rock, cinématique, metal et tout ce qui leur fait envie en fait comme le prouve par exemple ‘The Lesser Evil’. Cela donne un album de plus d’une heure et quart qui s’écoute en musique de fond comme en immersion au casque. Parfois on se laisse porter, parfois on s’accroche au bastingage pour ne pas chavirer.

Une heure et dix-huit minutes c’est la durée de deux 33 tours rouges bien remplis, et pourtant qui passent trop vite. Il faut dire que le paysage musical est varié comme les voix qui se succèdent. Et ce qui aurait pu devenir un patchwork sonore se révèle finalement d’une grande unité narrative grâce au génie de Earthside.

Sur les dix morceaux de l’album, quatre tournent autour des dix minutes et le plus court, ‘Vespers’, ne dépasse pas les trois minutes. Parfois la musique déborde de cordes comme dans ‘Let The Truth Speak’ mais le groupe s’essaye également aux cuivres, ce qui est plus inhabituel, dans ‘The Lesser Evil’.

Le style symphonique post-rock cinématique djent est presque la norme sur cet album avec des sections de batterie souvent époustouflantes et des guitares mandolines comme dans le dernier titre.

Durant ces soixante-dix-huit minutes, plusieurs morceaux m’ont tout particulièrement interpellés.  Le premier est ‘We Who Lament‘ avec Keturah au chant qui apparaît sur second titre. Sans être franchement démonstratif, il dégage une grande puissance intérieure sur une forme quasi post-rock cinématique. Ensuite il y a le magnifique instrumental post-rock ‘Watching The Earth Sink’ de près de douze minutes qui après un début intimiste explose un peu avant la moitié pour retomber rapidement. Impossible de passer sous silence également le très cuivré ‘The Lesser Evil’ qui nous prend presque à chaque fois par surprise, d’autant qu’il dure pas loin de onze minutes. J’ajoute à la liste ‘Denial’s Aria’, le seul titre avec du chant féminin accompagné au violon et pour finir je termine avec ‘All We And Ever Loved’ post-rock cinématique à souhait avec un délicieux passage de guitare mandoline et des grandes orgues.

J’attendais tellement le nouveau Earthisde qu’il risquait d’être propulsé directement au sommet du podium avant même d’être écouté. Sa découverte n’a pas refroidi mon enthousiasme donc dépêchez-vous d’aller sur Bandcamp écouter la merveille, vous m’en direz des nouvelles.

David Kerzner – The Traveler

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Il n’est pas évident de s’y retrouver parmi toutes les éditions que propose David Kerzner sur Bandcamp.  The Traveler se décline en effet en sept versions différentes sur la plateforme de streaming entre Super Delux, Hi Res 24 bit 96K, Singles digital EP, Special Edition et autres. Pour ma part, je me suis contenté de la version standard après bien des tergiversations.

J’ai connu David du temps de Sound Of Contact. En 2014, il sortait son premier album solo New World, qui je l’avoue, ne m’avait pas franchement convaincu, contrairement au magnifique Static arrivé trois ans plus tard.

J’ai hésité à commander The Traveler parce que David venait de sortir Heart Land Mines Vol 1. Ce qui m’a décidé paradoxalement, c’est le titre ‘A Time In Your Heart’ qui me rappelle furieusement l’album Abacab de Genesis que je n’aime pas du tout. Il est d’ailleurs possible que je vous parle beaucoup de Genesis et des Beatles dans cette chronique.

The Traveler poursuit l’histoire commencée dans New World, ce qui à la base n’était pas forcément une très bonne nouvelle. En effet, le premier opus, furieusement floydien, se diluait beaucoup, tout particulièrement dans sa version deluxe au vingt-trois titres dont le dernier qui culmine avec vingt et une minutes.

Ici, dans sa version standard, pas de folie, seulement neuf morceaux de deux à six minutes qui séduiront les prog head grisonnants comme moi. Il faut dire qu’il y a clairement un air de déjà entendu dans les mélodies de The Traveler, un côté Ray Wilson pour le premier titre ‘Another Lifetime’, du Abacab et RPWL dans ‘A Time In Your Mind’ ou du And Then They Were Three sur ‘Here and Now Part Two’ pour ne citer que ces trois morceaux.

The Traveler s’écoute remarquablement bien, sans doute parce que du beau monde joue avec David, voyez plutôt : Randy McStine, Nick D’Virgilio, Marco Minnemann, Billy Sherwood, Jon Davidson, Durga McBroom pour n’en citer que quelques uns.

Au début de la chronique, je faisais référence aux Beatles. Ce n’est pas pour parler ici de l’affligeant ‘Now And Them’ mis de ‘Better Life’ où vous reconnaîtrez peut-être des couleurs propres aux quatre garçons dans le vent.

Sur The Traveler, vous entendrez également de beaux arrangements au violon et violoncelle comme dans les deux parties de ‘Here and Now’ ou les deux premiers titres. Une belle manière d’enrichir la partition sans la saturer de synthés.

The Traveler n’était pas vraiment programmé dans mon agenda musical, principalement parce qu’il s’agit d’un album de 2022, mais après l’avoir fait tourner en boucle à la maison comme au travail, j’ai eu envie de le partager avec vous.

 Vous pouvez le découvrir dans toutes ses version sur Bandcamp et si je ne craignais pas de payer plus cher de taxes et de frais de port, je l’aurai commandé en CD.

Soen – Memorial

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J’ai donc enfin vu Soen en live. Et ils ont principalement joué leur dernier album Memorial bien évidemment. Sauf que je l’avais pas écouté sorti du single ‘Violence’ qui m’avait quelque peu déstabilisé.

Ben oui, Soen je le déguste principalement pour la sublime voix de Joel capable de m’émouvoir comme peu d’autres. Et là, surprise, il durcissait le ton, invitait une chanteuse à ses côtés et renonçait à ses talents de crooner. Pourtant, en live, sans doute fasciné par son aura magnétique, j’avais plutôt accroché aux nouveaux morceaux que je ne connaissais pas. Alors je suis parti du concert avec un exemplaire de Memorial dédicacé. Le lendemain, il tournait sur la platine et, nouvelle surprise, je l’ai tout de suite adopté.

Je disais souvent, en parlant de Soen, que j’aimais leur musique sans pouvoir en donner vraiment la raison. Eh bien c’est fini. J’adore Soen et je sais maintenant exactement pourquoi. Memorial, moins centré sur la voix de Joel, dévoile des musiciens talentueux qui jusque là restaient dans l’ombre du chanteur.

Memorial ce sont dix titres courts pour un peu moins de trois quart d’heure d’enregistrement. Deux des morceaux tranchent tout particulièrement ici, il s’agit de ‘Hollowed’ chanté à deux voix aux côtés de Elisa et du bluesy ‘Vitals’ au grand piano où le timbre de Joel est méconnaissable. 

Si Memorial débute de manière musclée, limite martiale avec un ‘Sincere’ rythmé et metal, au bout de trois minutes de maltraitance assumée, Soen livre un break apaisé aux couleurs chaudes avant de replonger dans la violence. C’est cette forme d’écriture, d’abord déroutante mais redoutablement efficace, qui prédomine sur tout l’album.

Le groupe use de refrains ravageurs comme dans ‘Unbreakable’, de soli de guitare à tomber par terre et de breaks au chant pour mieux revenir en force juste après. Les guitares de Cody s’expriment enfin pleinement sur Memorial. J’ai l’impression, qu’auparavant son travail restait nettement plus au second plan. Presque chaque titre livre son solo déchirant comme dans ‘Fortress’ ou floydien comme dans ‘Hollowed’.

Memorial se révèle rugueux et soyeux à la fois, une douce violence qui met en valeur le travail d’un groupe plus que la voix d’un chanteur. Evidemment, les aficionados de Soen pourraient être déstabilisés au début mais pour ma part, je classe Memorial dans les meilleurs albums écrits par le groupe à ce jour.

Encore un qui rentre dans mon top 2023 décidément de plus en plus chargé.

Sinon, Samedi prochain, Chez Paulette près de Nancy, l’association Arpegia organise un concert avec deux groupes dont je vous ai déjà parlé, Plus 33 et Amarok, alors si vous êtes dans le coin, déplacez-vous, ce sera forcément un beau concert.

Steven Wilson – The Harmony Codex

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Je l’ai trouvé trônant en bonne place au rayon vinyles de la Fnac en édition orange. Toutefois, refroidi par un certain The Future Bites, j’ai passé mon chemin. Rentré à la maison, j’ai tout de même hésité. Allez, juste une écoute pour voir. Mais pour cela, il fallait l’acheter, ne serait-ce qu’en digital. Alors, radin comme je suis, j’ai activé mes six mois d’essais gratuits sur Apple Music, moi qui n’écoute jamais de musique en streaming, oui, juste pour écouter The Harmony Codex, le dernier album de Steven Wilson.

Et après une seule écoute, j’ai regretté de n’avoir pas pris le vinyle à la Fnac. D’ailleurs j’y suis retourné le lendemain matin à l’ouverture et ils avaient encore l’édition orange.

J’ai rarement trouvé qu’un album portrait aussi bien son nom. Wilson nous a habitué à toutes sortes de frasques : metales, alternatives progressives, électro, pop, expérimentales et pour la première fois, il trouve le juste équilibre avec The Harmony Codex.

L’album de plus d’un heure et dix morceaux dont trois pistes de plus de près de dix minutes chacune, combine instrumentaux dignes des expérimentations de Porcupine Tree et des titres plus accessibles  comme le duo avec Ninet Tayeb sur le tube ‘Rock Bottom’, un morceau à tomber par terre. Et ce n’est pas tout, Théo Travis, Adam Holzman, Pat Mastelotto, Craig Blundell sont également de la partie avec bien d’autres artistes. Wilson a toujours bien sû s’entourer en solo.

Pourtant ma première impression, avant d’arriver au titre ‘Impossible Tightrope’ était que j’avais bien fait d’économiser dix euros et quatre-vingt dix neuf cents pour du Steven Wilson pépère, un peu pop et sans grande ambition. Une fois les dix minutes instrumentales passées, mon oreille a continué à écouter les titres d’une toute autre manière.

Le second électrochoc est venu avec ‘The Harmony Codex’ où Rotem Wilson lit le texte. Un grand format cinématique à la Hans Zimmer, clairement répétitif, qui rappelle beaucoup les expériences musicales dans les albums hors séries de Porcupine Tree il y a très longtemps de ça.

Mais résumer The Harmony Codex à trois titres, même s’ils me font un effet de fou, serait affreusement réducteur. Il faudrait parler des trouvailles sonores de ‘Economies Of Scale’, du solo de Niko sur ‘Time Is Running Out’ et de la voix vocodée mais surtout du dernier titre , le long ‘Staircase’ qui cette fois joue entre pièce chantée et BO de film à la manière de Vangelis.

Je crois que si Steven Wilson avait voulu composer un album pour moi, il aurait écrit The Harmony Codex. Et dieux sait que le bonhomme m’énerve souvent. Il a déjà pondu de véritables chefs d’œuvres, mais là, il frise l’absolue perfection avec un disque qui saura en plus toucher un assez large public.

Évidemment The Harmony Codex va bousculer encore le classement 2023 pour le titre de l’album de l’année. Cela va être très difficile de départager tout ce petit monde d’autant que d’autres merveilles arrivent.

Tesseract – War Of Being

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J’avais ajouté War Of Being dans ma liste de courses Bandcamp sans franchir le pas. Il a fallu que mon fils me dise que le dernier Tesseract passait en boucle chez lui pour que je me décide. Il faut dire que le garçon a bon goût, c’est moi qui l’aie éduqué musicalement.

Me voila donc avec une heure de djent composé par un groupe que j’adore depuis ses débuts. Neuf titres de cinq à onze minutes dans une magnifique pochette monochrome façon miroir où se détache une silhouette féminine voilée.

Tout s’annonçait donc sous les meilleurs auspices.

Vous le sentez le “mais” qui va suivre ? Oui, car il y a un “mais”, et de taille. Allez, je crache le morceau : je ne suis pas rentré dans l’album. Mais alors pas du tout.

Déjà, le premier titre, ‘Natural Disaster’, gueulard à souhait, m’a rebuté, surtout parce que je sortais d’une période plutôt cool. Ensuite, j’ai trouvé ce War Of Being glacial, bleu arctique, aseptisé, bref vide d’émotions. J’ai même trouvé certains passages techniques vraiment gratuits comme la section djent dans ‘Sacrifice’.

J’ai essayé de l’écouter au casque, sur les enceintes, mais rien à faire. War Of Being ne m’a pas touché. J’ai poussé le volume à faire éclater de triple vitrage, avalé des anabolisants, du café, de la taurine, mais rien à faire, je ne suis pas rentré dans sa musique. Si ça se trouve je n’aime plus le djent ?

Marrant d’écrire ça, mais le dernier Tesseract me semble trop policé, du metal prog se voulant corrosif mais avec des mains lavées plusieurs fois au gel hydro alcoolique. Si je les compare à Leprous qui a pris le chemin du soft metal lyrique petit bourgeois, je me dis que Tesseract n’a pas réussi sa mutation. Car sur War Of Being comme dans les derniers Leprous, il y a pas mal d’écritures softs sur lesquelles on pourrait poser des instruments à cordes.

En plus je trouve la production quasi feutrée. La batterie qui manque de mordant, le chant est amorti et les guitares lointaines. En réalité, je m’ennuie en écoutant l’album. Je n’irai pas jusqu’à dire que je n’aime pas War Of Being, techniquement les mecs maîtrisent leur affaire, soufflant le froid et le glacial, mais bon, chez moi, ça ne prend pas.

Alors un doute m’a pris. Et si je n’aimais plus Tesseract ? Après tout l’âge aidant, avec la surdité, qui sait ? Pour m’assurer de la chose, je reposé Sonder, leur album de 2018, sur la platine. Et là surprise, cet album m’émouvait toujours autant.

Ceci dit, mon fils qui aime beaucoup l’album m’a recommandé de l’écouter à partir du titre ‘War Of Being’ et de poursuivre, après ‘Sacrifice’ par ‘Natural Disaster’. Et c’est vrai, ça passe nettement mieux ainsi.

Vous pouvez tout de même l’écouter sur Bandcamp. Je serai curieux de savoir si vous posez un autre regard que moi sur cet album.

Bruce Soord – luminescence

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Vous connaissez forcément Bruce Soord, le chanteur et guitariste de The Pineapple Thief.

Mais connaissez-vous Bruce Soord, l’artiste solo ? Bruce vient de sortir son troisième album Luminescence chez Kscope, douze titres de trois à quatre minutes pour une durée totale inférieure à trois quart d’heure.

Contrairement à pas mal de monde, je préfère Bruce Soord en solo à The Pineapple Thief. Je trouve son univers musical personnel beaucoup plus épuré et intimiste.

Luminescence est un album joué principalement à la guitare et au chant avec quelques arrangements à cordes pour étoffer l’ensemble signés Andrew Skeet de The Divine Comedy.

L’album aborde la difficulté de trouver une forme de paix intérieure dans les grandes villes de nos jours. Pour illustrer cela, de nombreux enregistrements de bruits urbains accompagnent les morceaux. Sirènes, trafic automobile, bruit de fond, freins de bus, hélicoptère en approche, cris d’enfants, avion passant dans le ciel, des enregistrements réalisés par Bruce lors de ses tournées de par le monde.

Bruce apparaît en gros plan sur la pochette bleue, barbu, les yeux clos, les traits détendus, comme en pleine méditation. Une image qui correspond bien à cet artiste abordable, humble et gentil que j’ai eu la chance de rencontrer à plusieurs reprises.

Comme dit plus haut, pour la musique, ce sont les guitares de Bruce et le chant qui dominent avec des arrangements à cordes plus ou moins présents comme dans ‘find peace’, des bruits de ville, une peu de batterie probablement programmée et de l’électro comme dans l’unique instrumental de l’album très justement intitulé ‘rushing’.  On trouve également quelques touches électroniques dans ‘lie flat’ ou ’nestle in’ mais cela reste relativement anecdotique.

Mon titre favori est le single ‘dear life’ au clip bucolique filmé au coucher du soleil dans des champs de graminées à la fin de l’été. Une ode à la vie avec tout ce qu’elle comporte, l’amour comme la mort. J’aime également beaucoup ‘so simple’, un morceau très épuré où les arrangements se font lointains. Mais pour tout vous dire, j’aime chaque morceau de cet album.

Luminescence ne s’écoute qu’à des moments privilégiés car sa musique ne s’impose pas à vous comme certaines compositions plus grandiloquentes. Il faut être préparé à se poser quarante minutes au calme pour partager l’intimité de Bruce Soord et se satisfaire de quelques accords de guitare et de sa voix fragile.

Je n’ai au final qu’un seul reproche à formuler sur Luminescence, c’est la fin un peu abrupte du morceau ‘find peace’ qui conclut l’album. J’ai tellement envie que cela dure que j’attends toujours le titre suivant lorsque tout s’achève.

Les esprits chagrins pourront reprocher au nouveau Bruce Soord d’être sans grande surprise mais je ne pense pas que l’on écoute cet artiste pour être malmené, bien au contraire. A écouter d’urgence, d’autant que vous pouvez le trouver sur Bandcamp.

Quadrivium – VORDONA

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Parmi les nombreux achats effectués sur Bandcamp ces derniers jours (Pendragon, Ne Obliviscaris, Atomic Symphony, Aisles et d’autres), j’ai décidé de vous présenter le jeune groupe Quadrivium et son premier album VORDONA.

Le duo de metal progressif est formé de Tony au chant et de Pavlo qui joue de tous les instruments. Oui c’est assez casse gueule comme configuration, d’ailleurs j’y reviendrai.

L’album d’une demi heure propose sept pièces dont quatre qui forment The Tetralogy (quatre, tétra, vous voyez, rien de bien compliqué).

Ne nous mentons pas, Tony Ricci n’est pas un fabuleux chanteur. Il possède une palette assez limitée, sans doute encore bridée par la barrière de la langue. De même, les compositions de Pavlo Mysak ne jouent pas dans l’originalité, mais l’ensemble se tient suffisamment bien pour donner un coup de projecteur sur leur travail.

VORDONA est encadré par deux instrumentaux, ‘Prelude’ et, devinez quoi, un ‘ Postlude’ évidemment, des pièces électro symphoniques d’environ une minute chacune.

L’album combine djent, metal progressif, électro soft, arrangement orchestraux et atmosphériques sur du chant clair.

‘Dark Moons’ figure parmi mes titres préférés. La pièce de presque six minutes, une des plus longues de l’album, emprunte autant au metal qu’au symphonique cinématique. Elle est également la seule où Tony change légèrement de registre vers la quatrième minute.

‘Altered Perception’ qui suit ce morceau, est également de belle facture malgré une caisse claire au son de pot de yaourt que l’on retrouve en fait un peu partout sur l’album. Commencé de manière alternative, le titre monte en puissance et Pavlo y livre un solo de guitare réjouissant.

Sorti de ces deux pièces, j’ai quand même l’impression de tourner un peu en rond. Le chant de Tony en est partiellement la cause comme la section rythmique joué par un seul homme et assez peu inspirée.

Si en musique on parle de groupe, c’est parce que plusieurs artistes jouent ensemble, confrontent leurs idées, quitte à se fritter et apportent de la diversité à l’œuvre finale, là où un projet solo à tendance à se répéter. Et chez Quadrivium, cela se ressent beaucoup.

Du coup, le format de trente minutes est amplement suffisant pour cet album. Les curieux pourront le découvrir sur Bandcamp.

Avkrvst – The Approbation

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Je suis certain que vous êtes très nombreux à être passés à côté du dernier Porcupine Tree. Non, pas Closure / Continuation mais The Approbation. Ben c’est bien dommage, d’autant que le groupe s’est enfin séparé de son chanteur bigleux aux cheveux mis longs.

Désolé, on vient de m’informer que The Approbation n’était pas un album de Porcupine Tree mais du groupe Avkrvst. Bon j’ai l’air malin maintenant. La faute encore à ce petit suisse qui m’a vendu ça pour de la musique de la bande à Wilson.

Bref, The Approbation est un album sept titres de trois quart d’heure qui, ressemble à s’y méprendre à du Porcupine Tree. Enfin non, il y a quand même des différences. Le chanteur growle parfois et le batteur n’est pas Gavin Harrison.

Avkrvst est un quintet de rock progressif norvégien qui signe chez Inside Out son premier album.

Je râle souvent contre les formations qui copient d’autres groupes. Parce que bon, c’est sympa d’explorer de temps en temps de nouveaux horizons. Mais comme j’étais prévenu par Stéphane et que personne ne m’a forcé à écouter l’album, ben ça ne m’a pas dérangé. J’ai même trouvé ça plutôt sympa cette ressemblance.

Même les textes font référence à Porcupine Tree comme par exemple sur le titre ‘Anodyne’, enfin, je crois. D’ailleurs, puisque l’on parle des textes, ceux-ci ne sont pas vraiment à la fête puisque Simon, le chanteur, nous entraîne dans l’antichambre de la mort.

The Approbation ressemble à du Porcupine Tree sans être du Porcupine Tree. Les guitares acoustiques et les riffs électriques s’en approchent beaucoup, la batterie et la basse nettement moins. Et pour le chant, je n’imagine pas Steven Wilson se lancer dans un growl.

Ceci-dit, ça pourrait être pour lui un nouveau départ après avoir donné dans l’électro pop commerciale.

L’album contient deux instrumentaux , ‘Osterdalen’ et ‘Cold Days’, la seconde partie de ‘Isolation’, ainsi que deux titres fleuves qui terminent la disque, ‘Anodyne’ et ‘The Approbation’. Si Avkrvst se rapproche beaucoup de qui vous savez, vous trouverez également des inspirations venant de Opeth à certains endroits quand ‘Isalosation’ emprunte certains motifs à Dream Theater. C’est assurément le titre album, une pièce d’un quart d’heure qui est la plus proche de Porcupine Tree. On y retrouve le chant vocodé, des motifs de guitares bien connus et ces expérimentations que le groupe jouait en seconde partie de concert après avoir vendu leur dernier album.

Vous l’aurez compris, The Approbation ne va pas changer la face du prog. Ceci dit, rien d’étonnant à cela puisqu’il est sorti chez le label Inside Out. N’empêche, c’est un très chouette album. On peut juste espérer que le groupe s’émancipe de son modèle et nous propose quelque chose de plus original dans les années à venir.

IGNEA – dreams of lands unseen

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Aujourd’hui, Chroniques en Images soutient une nouvelle fois l’effort de guerre contre la Russie en vous présentant un groupe venu de Kiev. Bon, pour être honnête, je ne cherche pas à financer les drônes qui s’abattent sur Moscou. J’ai juste envie d’écouter de la bonne musique.

IGNEA est une formation de metal symphonique ukrainienne à deux voix et deux langues. D’un côté un chant clair féminin délicieux en anglais et en ukrainien, de l’autre un growl granuleux, tout ça produit par les mêmes cordes vocales, celles de Helle Bohdwnova.

Le concept album Dreams of Land Unseen raconte la vie et le travail de la photographe et reporter ukrainienne Sofia Yablonska née en 1907. Elle a vécu en France à partir de 1927 et parcourt le monde , le Maroc, la Chine l’Indochine, le Sri Lanka, le Laos, le Cambodge,  les îles de Java, Bali et Tahiti, l’Australie, les États-Unis et le Canada. Une artiste qui a documenté la vie de tribus indigènes de part le monde.

L’album est donc une sorte de voyage metal progressif symphonique avec quelques touches de world music, cinquante pourcent de growl et une très belle voix pas forcément dans les canons du genre. Dépaysement garanti, un road trip allant des dunes du Sahara jusqu’à l’opium chinois.

Le contraste entre growl et chant clair est vraiment saisissant lorsque vous découvrez leur musique, un peu trop peut-être mais après quelques écoutes l’oreille s’adapte. Les claviers de Yevhenii Zhytniuk aux motifs électros symphoniques apportent la touche metal progressive à cet album ainsi que les éléments orientaux et asiatiques qui colorient la musique.

‘Dunes’, ‘To No One I Owe’ ou ‘Nomad’s Luck’ donnent dans l’oriental quand ‘The Golden Shell’ et ‘Opiumist’ font dans les chinoiseries. Il y a même du djent dans ‘Zénith’ et ‘Incurable Disease’ pour ceux qui n’aiment pas l’exotisme.

Autant j’aime beaucoup les influences metal oriental dans cet album, autant les touches venus du pays du soleil levant me tapent un petit peu sur les nerfs. Il faut dire que je ne suis pas vraiment fan des chinoiseries sauf en cuisine. C’est tout particulièrement le cas avec ‘The Golden Sun’ qui donne dans le cliché asiatique pour touriste.

‘Opiumist’ au son d’un erhu numérisé, de claviers électros et peuplé de bruitages et de voix passe nettement mieux, d’autant que sa seconde partie metal avec le chanteur de Before the Dawn décrasse bien les oreilles.

Restent quelques pièces, de facture plus classiques, comme l’excellent death metal électro ‘Camera Obscura’ qui fait figure de tube sur cet album ou encore ‘Incurable Disease’. Elles équilibrent intelligemment l’ensemble.

Dreams of Land Unseen n’est pas un album fondamentalement révolutionnaire mais quelques points le distingue des autres productions du genre : de forts contrastes vocaux, le timbre de la chanteuse, des éléments world music et le concept lui même, car écouter la vie d’une photographe me change clairement des trucs démoniaques et des histoires de science fiction.

Les albums du groupe IGNEA méritent clairement  la découverte, sur Bandcamp par exemple, d’autant que les concepts se suivent sans se ressembler, de la conquête spatiale jusqu’à la photographie.