Dans les toilettes

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Hier matin j’ai reçu le MMS suivant : 

Bonjour papa , mon téléphone est cassé, c'est mon numéro temporaire, peux-tu m'envoyer un WhatsApp, pas par SMS !
+33773399739

Le numéro de téléphone de SMS était le +33 7 89 30 01 17 et celui sur lequel je devais le recontacter le +33 7 73 39 97 39 ce qui aurait dû me mettre la puce à l’oreille.

Mais sur le coup je n’ai pas vraiment réfléchi, j’étais en déplacement depuis 6h30 avec quelques heures de route au compteur et un seul café dans les veines.

Alors j’ai contacté ce numéro via WhatsApp avec ce message :

Hello, téléphone HS ?

J’aurais pu réfléchir deux secondes. S’il pouvait me contacter via WhatsApp c’est que son téléphone fonctionnait ou que le nouveau qu’il utilisait, puisque c’était un autre numéro de téléphone, pouvait recevoir des SMS et des appels. Mais bon j’avais plein de travail et toujours qu’un seul café baignant les neurones.

Le gars m’a répondu ceci :

Cc papa, mon téléphone est tombé dans les toilettes, 

Alors je me suis marré. Et lui a continué.

C'est ne pas drôle, J'ai tout perdu, photos et fichiers, Toutes les applications importantes, Papa, j'ai un peu honte de te le demander, mais j'ai besoin de ton aide.. Tu reçois?

Mais ça, je l’ai lu à 13h après un café serré bu à la fin du repas de midi. J’avais l’esprit nettement plus clair. Alors j’ai voulu jouer. J’ai répondu « Yep » et le bonhomme a poursuivi.

Je dois payer 2 factures  malheureusement j’ai pas accès à ma banque en ligne je peut te les envoyer ? Je te rembourse pour jeudi..

J’ai répondu, en bon père que je suis :

Ben oui bien sûr

Et lui de continuer.

Merci beaucoup, J'ai parlé à ma banque et ils m'ont dit que je ne pourrai plus me connecter à mon compte avant jeudi, Alors je te rembourserai, d'accord?

Prends moi pour un con… j’ai donc répondu « Yep ».

Et lui de m’envoyer les informations :

Je t'enverrai les détails 
Nom: Sophie Lefèvre 
Iban: DE78 5087 0324 0067 6932 00
Motif: GDH 0091
Montant: 2494.95
Virement SEPA
Le bic est DEUTDEDBP26

Après quelques minutes de silence, je l’ai informé que la transaction était réalisée et lui ai demandé quelle était la seconde. C’est là qu’il m’a demandé une preuve de virement. Là j’ai fait le débile j’avoue, lui expliquant que je n’avais pas encore reçu la confirmation par mail et que je ne savais pas faire une copie d’écran pour lui envoyer. Il a voulu savoir si j’étais sur un PC. J’ai répondu que non, j’avais fait le virement depuis mon téléphone. Et sans doute pour m’expliquer comment faire la copie d’écran, il m’a demandé la marque de mon smartphone. J’ai répondu que je ne savais pas.

Quel téléphone as-tu ?

Je ne sais pas, c’est toi qui me l’a offert.

Ça l’a fait rire. Il a fait encore quelques tentatives, me proposant de refaire le virement jusqu’à que je lui dise que je ne pouvais pas, parce que mon téléphone était tombé dans les toilettes. Après cet échange, il a été soudain assez mal poli, il faut bien l’avouer.

Hahaha 
Fils de put

Bon, j’ai signalé son numéro de téléphone à l’adresse des Spams au 33700, je l’ai bloqué et j’ai signalé le bouffon sur WhatsApp. Cela ne va sans doute pas beaucoup l’arrêter mais je le suis bien amusé… Mais faites quand même gaffe.

Fil bleu, fil rouge ?

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Lorsque vous achetez un appareil, lisez-vous la documentation utilisateur ? Moi non, tout au plus je regarde les images vite fait.

Il y a un an j’ai commandé une caméra de guidage livrée avec deux câbles, un RJ45 et un USB 3.0. Et logiquement, lorsque je l’ai branché à l’Asiair Plus, j’ai connecté les câbles USB et RJ45 puisqu’il y avait deux prises de ce genre de l’autre côté. D’ailleurs aucun des deux équipements n’a rechigné. Donc c’était forcément bon.

Cependant dès que j’ai utilisé la caméra de guidage avec l’Asiair et la monture Celestron AVX, j’ai trouvé le fonctionnement de l’ensemble assez peu satisfaisant. La seule fois où je n’ai pas branché les deux câbles, par erreur, l’ensemble a mieux fonctionné que d’habitude. Mais comme je suis moi, j’ai accusé la monture AVX d’être la cause de mes problèmes. Alors je l’ai remplacé par une monture AM5 beaucoup plus couteuse, imaginant que la monture AVX avait un problème.

D’ailleurs j’ai cassé les pieds à nombreuses personnes dans les forums spécialisés pour trouver une explication logique à mon problème, sans résultat. La monture ZWO AM5 s’est nettement mieux comporté, principalement parce que je lui faisais supporter une lunette de trois kilos à champ large au lieu d’un télescope de deux fois plus lourd et ouvert à f/d 10.

Mais malgré tout, le résultat n’était pas forcément très satisfaisant.

Un jour de très gros plantage, j’ai commencé à me poser enfin les bonnes questions et à remettre en cause mon savoir faire. J’ai ressorti la notice de la caméra et de l’Asiair et ai remarqué sur les photographies de branchement, que seul le câble USB était connecté entre la caméra et l’Asiair. J’ai cherché à savoir ce que pilotaient ces fils et j’ai compris que je n’avais pas besoin du câble RJ45.

La même chose m’était arrivée avec un câble de déclenchement pour appareil photo que je branchais en doublon avec l’USB. Les deux envoyaient la même information mais avec un léger décalage, semant la panique dans l’ordinateur.

Le pire c’est que je ne suis pas le seul à avoir commis cette erreur. Nous avons eu des échanges interminables sur les réglages de l’autoguidage d’un télescope, sur son installation, sur son utilisation, mais pas une seule fois nous n’avons remis en cause son branchement à l’Asiair. Jusqu’à ce qu’un terrible doute m’assaille, que j’en fasse part à d’autres et qu’une petite voix se manifeste pour dire, « moi aussi, je fais pareil. ».

Débrancher le câble en question n’a résolu tous mes problèmes. Par contre, un meilleur positionnement du contrepoids sur la monture, la fin d’une bien mauvaise pratique de mise en station et de meilleurs ajustements des paramètres dans l’Asiair ont probablement solutionné le problème du guidage. Cela reste à vérifier mais mes deux dernières tentatives se sont révélées nettement plus concluantes que les précédentes.

Camping

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Un transat, une chaise en toile, une table pliante, un thermos, une gamelle isotherme, des couverts en bois, une lampe frontale, une couverture, je suis fin prêt pour le camping des Flots Bleus. 

Sauf qu’au lieu du short de bain, je porte un pantalon de ski, des sous-vêtements thermiques, un anorak, des mitaines et des sous gants, un bonnet, des bottes de grand froid et des semelles chauffantes.

Je fais du camping sauvage à plus mille mètres d’altitude sur un parking goudronné bordé de congères sous le ciel étoilé. La plaine d’Alsace est noyée dans le brouillard givrant mais ici les températures sont tout justes positives.

Des ramens aux légumes dans la gamelle, une soupe miso dans le thermos, une bouteille d’eau pour la soif, une canette coca pour lutter contre le sommeil, un cake Papi Brossard pour le sucre, j’ai de quoi tenir un siège jusqu’à l’épuisement des batteries.

La route qui grimpe au Champ du Feu scintille dans la lumière des phares. Les voitures des skieurs redescendent après une journée au soleil. Moi, je monte chercher les étoiles. 

Il y a toujours du monde là haut, de rares astronomes amateurs, des randonneurs avec leur lampe frontale, des amoureux à la recherche d’un lieu romantique, des adeptes de tuning venus faire rugir leurs moteurs, des marginaux dormant dans leur véhicule, des touristes en camping-car et quelques sangliers égarés.

Des curieux s’approchent timidement de l’étrange machine bardée de câbles aux LEDs clignotantes autour de laquelle s’affaire un hurluberlu en combinaison d’astronaute.

Les fous attirent les fous. Les complotistes, les ufologues, les platistes, les trumpistes plus audacieux s’approchent pour poser leurs questions sans queue ni tête. Avez-vous déjà vu des phénomènes inexpliqués dans le ciel ? La Lune est-elle creuse ? Mars abrite-elle une ancienne civilisation comme l’affirme la NASA ? Jusqu’à quel point notre gouvernement nous cache la vérité sur la COVID 19 ? Pourquoi la nuit est-elle noire si les étoiles sont des soleils ? Croyez-vous qu’il y a de la vie ailleurs ? 

Largement de quoi occuper tout une nuit en questions réponses. 

C’est l’occasion de partager un café et quelques biscuits, d’observer la technique utilisée par le voisin pour réaliser une mise au point parfaite, de montrer nos plus beaux clichés, de comparer notre équipement, de raconter nos pires galères, d’inviter les visiteurs intrigués à jeter un oeil dans nos instruments étranges pour découvrir Jupiter ou bien Saturne, d’expliquer le ciel, les constellations, les planètes, les nébuleuses, les galaxies. Nous nous passons les jumelles pour approcher les étoiles de nos yeux d’enfants. Nous nous exclamons au passage d’un bolide et nous pestons devant un train Starlink qui va gâcher notre série de photographies.

Le pique-nique nocturne se s’achève lorsque les batteries faiblissent ou que l’astre observé est trop bas sur l’horizon. Les derniers badauds sont partis depuis longtemps. Chacun a retrouvé son setup et s’est emmitouflé dans une couverture. Le sommeil et le froid commencent à piquer les yeux. Il est temps de remballer le matériel glacé et de redescendre sur la route glacée, plonger dans le brouillard givrant et retrouver le plancher des vaches. Une nuit de camping sauvage se termine et je regarde déjà les prévisions météorologiques pour savoir quand je pourrais remonter là haut, retrouver les étoiles et leurs adorateurs.

Les hordes migratoires

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J’ai quitté Twitter peu après son rachat par Elon Musk. En effet le réseau social classé X ne correspondait plus vraiment à mes aspirations. 

Un ancien de X m’a fait rentrer chez BlueSky avant que le réseau ne soit ouvert à tout le monde et je me suis créé en parallèle un compte sur Mastodon. Ma petite communauté s’est progressivement reconstruite et depuis je poste régulièrement mes billets et photographies sur ces réseaux sociaux.

Des lieux bon enfant, peu politisés, où les créateurs proposent du contenu souvent de qualité sans s’enliser dans des débats stériles. À côté de ça j’ai toujours Facebook où je publie en mode ami les billets pour quelques personnes que je connais dans la vraie vie ainsi que mes chroniques musicales sur une page dédiée.

Jusqu’à la réélection de Trump, tout allait bien sur BlueSky. Et puis soudain, de nombreux utilisateurs de X ont migré vers l’autre réseau social.

Dans mon fil d’actualité j’ai commencé à lire des réactions à vif sur la politique, sur Trump et évidemment sur Elon Musk. J’ai commencé à tomber sur des publications débiles et pire, j’ai reçu des commentaires se rapprochant de plus en plus des spams. En contrepartie j’ai obtenu plus de petits cœurs et j’ai été reposté plus souvent, surtout les photos qui ont reçu un bel accueil. L’effet de masse.

Pour l’instant cela reste supportable, mais pour combien de temps ? Combien de temps avant qu’un imbécile me prenne en grippe et commence à me harceler comme sur Facebook à la grande époque ? Du coup je réfléchis sérieusement à fermer mon compte BlueSky. Oui déjà…

Les réseaux sociaux me servent de vitrine. Je n’y traîne pas vraiment. Je regarde le travail de quelques photographes qui me plaisent, je lis de temps en temps les billets de quelques amis et je réagis très rarement aux publications. Par contre, le déferlement de bêtise que je découvre en ouvrant les applications chaque jour pour ma publication quotidienne, me font halluciner.

Windows

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Depuis une dizaine d’années je travaille sous Mac. Après des décennies à utiliser des ordinateurs portables Windows qui me duraient à peine trois ans avant de devenir obsolètes, j’ai décidé d’investir dans la marque de la pomme en payant trois fois le prix d’un PC de compétition. Je ne regrette pas ce choix. Ce bon vieil iMac tient toujours la distance même pour le traitement photo et vidéo.

N’empêche, je viens de me résigner à acheter un PC sous Windows 11 tout dernièrement. Bon un tout petit ultra portable 13 pouces reconditionné par une boite locale qui fait de la réinsertion sociale. Un i5 8Go avec un SSD de 256 Go totalement incapable de rivaliser avec le vieux i7 32Go et son SSD de 2To. 

Mais j’avais oublié comme il était pénible de travailler sous Windows. Tout commence par l’installation du système qui dure des heures puis la suppression de tous les logiciels inutiles que l’OS a éparpillé sur le SSD. Ensuite il faut installer les applications dont vous avez besoin sachant que Windows considère comme hostile tout ce qui ne vient pas de son écosystème. Evidemment les programmes ne fonctionnent pas parce qu’il manque les inévitables drivers des caméras et montures, du coup un bon moment se passe encore avant de trouver les drivers en question et de les installer. Et puis il y a ce clavier où les caractères spéciaux sont placés à des endroits improbables, ces menus qui ne restent pas en haut de l’écran et ce navigateur web tellement agaçant.

Pour être totalement honnête, lorsque j’ai eu mon iMac, je me suis fait exactement les mêmes réflexions. Mais voilà, je me suis habitué à l’écosystème Apple et j’ai renié l’univers selon Steve Jobs. Alors ça m’énerve.

Mais pourquoi acheter un petit PC portable alors que j’ai un gros Mac ? Je vous en avais déjà parlé dans le billet Planétaire. Oui, pour faire de l’astronomie bien sur. De toutes manières, toute ma vie tourne autour de l’astronomie depuis quelque temps…

Les gourous de la secte m’ont expliqué que pour réaliser des images des planètes il fallait filmer celles-ci à très grande vitesse et que l’Asiair, l’ordinateur qui pilote mon télescope, n’était pas capable de supporter la cadence. Après quelques essais peu concluants avec l’Asiair et le logiciel Planetary Stacker System, j’ai franchi le cap et acheté un PC potable low cost reconditionné par une association de réinsertion histoire d’avoir bonne conscience et ne pas dépasser le budget que je m’étais fixé.

Me voilà donc dans le jardin avec un télescope, un Asiair, une tablette, deux caméras et un PC ultra portable. Tout ça pour essayer de photographier Jupiter, Vénus et Mars.

Conformément au conseils des mes ainés, j’ai installé ASIStudio, AutoStakkert, FireCapture, AstroSurface et WinJUPOS. FireCapture sert comme son nom l’indique à la capture des images de la caméra, 6 Go en 60 secondes via le câble USB 3.0, autant dire que ça dépote ! AutoStakker va additionner les meilleures images de la vidéo pour fabriquer une photo plus détaillée. AstroSurface permet également de faire l’empilement mais également de retoucher le cliché afin d’en augmenter les détails. WinJUPOS lui semble être une sorte d’éphémérides planétaire mais pour tout vous avouer j’ai fait l’impasse dessus. Cela fait beaucoup de choses à intégrer d’un coup.

Mes premiers essais sont affreux et j’ai déjà une longue liste de points d’amélioration à tester. Faire une bonne mise au point, m’éloigner de la route et des vibrations de la chaussée due aux bus. Utiliser le pied de la monture AVX qui est beaucoup plus stable que celui en fibre de carbone de ZWO. Changer de lentille Barlow pour corriger les aberrations chromatiques de celle que je possède. Aller en altitude pour profiter d’un ciel moins pollué. Apprendre à utiliser ces logiciels et perfectionner la mise en station du matériel.

Mais voila, je m’amuse, même si c’est sous Windows…

Tout seul dans le noir

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La neige est tombée sur le contreforts des Vosges. Le mercure a plongé dans les températures négatives. La fin des vacances approchent et tout le monde semble décidé à rester emmitouflé au coin du feu ce soir.

Sauf moi. Je suis tout seul avec moi-même dans le noir, assis sur une chaise pliante au milieu du vignoble à contempler la lune et Vénus qui se couchent sur les sommets enneigés. 

J’entends au loin les aboiements d’un chien inquiet qui se rapprochent. Ma frontale rouge qui balaie la nuit couleur d’encre doit l’intriguer autant que l’inquiéter. Il finit par arriver avec son maître, encore plus surpris de trouver un être humain vivant installé au milieu de nulle part. Le maître me lance un salut méfiant et le chien passe son chemin non sans avoir grogné une dernière fois. Cette fois je suis vraiment tout seul.

Et puis vient le silence troublé par le ronronnement discret de la caméra et quelques cris de rapaces nocturne. 

Le télescope est installé et pointe une nébuleuse de la constellation du taureau. Les chinois assistèrent à l’explosion de son étoile en 1054 et sa lumière illumina la voûte céleste pendant encore deux années. Aujourd’hui il reste de magnifiques draperies de gaz illuminées par les étoiles que mon télescope tente de saisir. 

Il fait très froid. Du givre se dépose sur le matériel et les valises de transport. Avec trois couches de vêtements, des semelles chauffantes, un bonnet et une capuche, des sous-gants et des mitaines, la température est presque supportable. 

Par contre la solitude est infinie. Une fois le matériel installé et réglé, une fois la calibration effectuée et la cible pointée, il ne reste plus qu’à surveiller que tout fonctionne bien sur les moniteurs. 

Une photo toutes les soixante secondes et ceci pendant au moins deux heures pour espérer obtenir quelques détails dans la nébuleuse. Sorti de pauses grignotage, soupe en thermos, banane et cake aux fruits confits, je pends des jumelles grand champ pour repérer le double amas de Persée, la galaxie d’Andromède, la nébuleuse d’Orion, Mars, Jupiter, Vénus et la Lune. 

Les minutes sont interminables avec personne à qui parler. Il y a bien mes amis astronomes qui échanges des messages sur WhatsApp. Ils observent les planètes depuis leur terrasse ou leur balcon et partagent de magnifiques images. En attendant je suis tout seul dans le noir. 

Soudain un bruit sourd et très proche me fait sursauter. Une porte claquée, un animal forçant un clôture, un psychopathe armé d’une batte de baseball ? Non, c’est ma tablette qui a glissé sur la valise à cause du givre. 

Seulement quatre vingt images. Il m’en faut au minimum cent vingt pour cumuler deux heures de photos.  Je suis en plein dans l’axe des décollages de l’aéroport Strasbourg-Entzheim et des avions ont déjà gâché deux images. Quand ce n’est pas Starlink qui pourrit le ciel, ce sont les Airbus A320. 

Je regarde le chronomètre égrener les soixante secondes de chaque cliché. Que le temps s’écoule lentement dans la nuit par moins cinq degrés. 

Le ciel n’est pas vraiment fabuleux. Certes il n’y a pas de nuage ce soir ce qui est assez rare dans notre région, mais je distingue à peine la Voie Lactée. J’aurais pu monter au Champ du Feu mais avec la couche de neige et une température ressentie proche de moins onze degrés, je ne m’en sentais clairement pas le courage. 

La photo sera certainement moins belle mais c’est la première fois que je photographie la nébuleuse du Crabe, alors ce sera déjà mieux que rien. 

Les mitaines à capuchons qui protègent mes mains glissées dans des sous-gants couvrent mal mes pouces gelés. Les parties amovibles se défont tout le temps, laissant les doigts à l’air. Mes jambes, malgré un pantalon de pluie, un jean et un collant, commencent à ressentir la morsure du givre. Mon nez est congestionné et je n’ai plus de soupe chaude. 

Cent images empilées. Encore vingt-cinq et je remballe le matériel. Cinq de plus pour compenser les inévitables rejets. Je me réchauffe tant bien que mal en marchant dans le noir tout en restant à proximité du matériel pour surveiller le guidage. 

Ces derniers temps j’ai eu de nombreux problèmes avec mon système. Je surveille également le niveau des batteries car avec le froid mordant, leur autonomie baisse à toute vitesse.

Les semelles chauffantes commencent à faiblir. Elles qui étaient annoncées pour huit heures de fonctionnement, n’iront pas au-delà de cinq, mais c’est déjà pas si mal. 

Je suis arrivé à 18h et que je compte lever le camp vers 23h. J’ai besoin de presque une heure pour monter le télescope, faire une bonne mise au point sur une étoile, réaliser l’alignement polaire, calibrer l’autoguidage et commencer à photographier l’objet. J’ai gâché une demi-heure de précieuses photographies suite à une erreur de réglage de la caméra. Cela m’apprendra à faire plus attention.

Cent-vingt-cinq clichés. Ça y est ! Maintenant je dois réaliser les images de calibration. Des Flats, c’est à dire des images blanches pour détecter les défauts optiques de mon système, les poussières et le vignettage, des Darks et des Bias c’est à dire des images noires pour retirer le bruit thermique aléatoire du capteur de la caméra même si celle-ci est refroidie à -20 degrés Celsius. Cela prend encore une demi-heure et il est temps de tout remballer en n’oubliant rien. 

La peau de la banane est durcie, les câbles ont perdu toute souplesse, les malettes sont blanche et la voiture est recouverte de givre. 

Lorsque je démarre le moteur et allume le chauffage, je sens mon corps revivre. J’allume la radio pour enfin entendre une voix humaine et je reprends la route vers Strasbourg, heureux de cette nuit en solitaire mais impatient de retrouver mon lit bien chaud.

Motion de censure

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Des fois j’ai l’impression que les électeurs et certains hommes politiques ne mesurent pas vraiment les conséquences de leurs actes.

Le 9 juin 2024, notre président dissolvait l’assemblée nationale sur un coup de tête et le 30 du même mois, le peuple s’exprimait par votre, transformant durablement la physionomie de l’hémicycle.

Sans majorité bien établie, il fallut attendre le 5 septembre pour qu’un nouveau premier ministre soit nommé en la personne de Michel Barnier. Hélas, mille fois hélas, son gouvernement pris fin le 5 décembre, après le vote d’une motion de censure.

Le 13 décembre, François Bayrou lui succédait et le 23 décembre, celui-ci annonçait son nouveau gouvernement.

Conséquence de tout cela, depuis le 5 décembre 2024, le budget 2025 reste suspendu au vote des députés et certains annoncent déjà une nouvelle motion de censure.

Et alors me direz-vous ?

Ce n’est que de la politique tout ça !

Oui, mais je travaille dans une administration qui dépend des subsides de l’état pour fonctionner. Et de l’argent, nous n’en avons plus depuis mi décembre, date de clôture de l’exercice comptable 2024. En gros les caisses sont vides. Et sans budget, nous ne faisons plus grand-chose, surtout moi qui gère les achats et les marchés publics.

Nous ne pouvons pas payer les factures 2024 en souffrance, nous pouvons plus rien commander et pire encore, nous ne pouvons plus signer de marché avec les entreprises. De nombreux contrats d’entretien, de ménage, de télésurveillance, de contrôle incendie, qui devaient démarrer en début d’année, sont suspendus au vote du projet de loi finance 2025. 

La bonne nouvelle c’est que nous sommes encore payés, à ne rien faire puisque de 80% de mon activité consiste à gérer les dépenses publiques, mais payés quand même. Par contre, si nous ne faisons pas grand-chose, le retard s’accumule comme les factures et les contrats en attente de signature. Lorsque la machine va redémarrer, les journées risquent d’être très chargées. En attendant je bulle.

Le bilan de l’année 2024

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Bonne année à tous et toutes !

L’année 2024 ne fut pas de tout repos croyez-moi. Entre la photographie, la musique, l’astronomie, le travail, des problèmes familiaux et de santé, le temps a passé très vite, au point de ne pas vraiment trouver le temps de prendre de vraies vacances.

Du coup cette année je n’ai écouté qu’une soixantaine d’albums de rock et je n’ai assisté qu’à quatre concerts de prog. 

Pour les albums, c’est devenu ma moyenne et elle me semble parfaite pour prendre le temps d’écouter de la musique. Pour les concerts c’est vraiment peu mais la salle de la Laiterie à Strasbourg est en travaux et l’association ArpegiA a été contrainte au repos forcé avec la fermeture temporaire de Chez Paulette. Heureusement cette année ils organisent trois soirées de rock progressif. J’ai quand même assisté à quelques des concerts classiques et participé aux shooting de différents événements locaux comme le Printemps des Bretelles.

La chaîne YouTube a dépassé le cap des 200 abonnés (merci à vous) et certaines vidéos ont été visionnées plus de 900 fois.

Le blog, lui, se maintient à 500/600 pages vues par semaine ce qui est amplement suffisant pour justifier son existence même si ce sont principalement quelques amis qui me lisent.

L’astronomie a pris beaucoup d’importance cette année (vous l’avez peut-être remarqué) avec plusieurs sorties en montagne avec les copains pour photographier le ciel et pas mal d’expérimentations en tout genre afin d’améliorer mon setup. Ce sont aussi mes premières images de ciel profond acceptables, du moins dont je n’ai pas trop honte.

La photographie ‘artistique’ reste une de mes grandes activités chronophage. Je publie toujours trois clichés par semaine contre vent et marées et cette année j’ai eu un déclic avec la couleur. Dix de mes photos ont eu l’honneur de figurer dans groupe Explore de Flickr c’est à dire d’être vues plusieurs milliers de personnes chacune et mon exposition 2024 s’est nettement mieux passé que l’année précédente.

J’ai lu seulement une quinzaine de livres (et pas toujours des meilleurs) principalement par flemme. J’ai compensé en regardant en moyenne un épisode de série TV par soir soit pas loin de 35 saisons et une vingtaine de séries différentes. Par contre je n’ai pas été une seule fois au cinéma, oui, je sais c’est mal.

La santé a suivi inexorablement la courbe inverse de celle de l’âge et cette année j’ai réalisé un véritable marathon d’examens suite à de mauvais résultats sanguins. Un épisode stressant où pour la première fois de la vie un médecin m’a parlé de cancer droit dans les yeux. Je vous assure, ça fait flipper. Bon il semblerait que pour l’instant j’échappe au pire mais ce n’est que partie remise. Je vais devoir me faire suivre de très près. À côté de ça, le rein donne les signes de faiblesse habituels et mon hernie discale est de retour en force. Bref je passe beaucoup plus de temps que je ne le voudrais chez les médecins. Par contre je ne fais presque plus de migraines. On ne peut pas tout avoir.

Le travail ressemble toujours à un cauchemar qui se passerait dans la bonne humeur. Plus que six années à tenir si le gouvernement ne change pas à nouveau les règles du jeu. Je ne vous le cache pas, j’ai hâte d’en finir avec ça. 

Si vous n’êtes pas né dans une éprouvette et que avez décidé un jour de fonder une famille, arrive un temps où vos enfants deviennent grands et vos parents très vieux. Une période difficile de la vie où les enfants ne sont pas encore vraiment des adultes responsables et où les parents redeviennent des enfants. Bref beaucoup de problèmes. Cette année les vacances ont été utilisées pour faire des aller retours pour aider la famille.

Une année ordinaire qui a filé à toute vitesse et qui annonce une nouvelle année à priori riche en péripéties. Youpi !

Pour les publications je pense conserver le même rythme à savoir une vidéo, trois billets de blog et trois photos par semaine, une exposition photographique, quelques nuits blanches à plus de mille mètres sous les étoiles et des prises de sang régulières.

Mais en attendant les prochaines publications, je vous souhaite une merveilleuse année 2025 !

Salles d’attente

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Quelques sièges alignés, une table basse où trônent de vieux magazines, plein de personnes assises, le regard plongé sur l’écran de leur smartphone, je suis installé dans une salle d’attente.

Masque recommandé, distanciation obligatoire, j’attends mon tour, la boule au ventre. 

Kinésithérapeute, médecin généraliste, prise de sang, échographie, laboratoire, médecin généraliste, spécialiste, IRM, chirurgien, anesthésiste, clinique, j’attends avec une angoisse grandissante le prochain rendez-vous programmé sur Doctolib. 

Ma boîte mail est pleine de ces messages, des rendez-vous, des résultats. Mes SMS également, me rappelant quand je dois retourner chez tel ou tel praticien, comme si je ne savais pas que je devais y aller.

J’ai tout d’abord pris des rendez-vous en soirée après le travail puis j’ai demandé à quitter le bureau plus tôt pour finir par poser des journées de congé. On m’a bien proposé un arrêt de travail d’une journée mais à quoi bon ? Il y a les jours de carence. J’ai informé ma hiérarchie que que je risquais d’être absent assez souvent, j’en ai parlé à quelques amis et j’ai fini par avertir la famille.

L’attente entre chaque examen et ses résultats est interminable. Limite insoutenable. Plus j’avançais dans les examens, moins bonnes étaient les nouvelles.

De salle d’attente en salle d’attente, les patients se font moins nombreux et plus angoissés. Les enjeux grimpent. Je ne suis pas encore résigné, je garde l’espoir de passer au travers.

La dernière salle d’attente me trouvera certainement allongé entre quatre planches de bois. La bonne nouvelle c’est que ça n’est pas pour tout de suite.

On en reparle dans six mois, à la prochaine prise de sang.

Duplicatas

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Photo : Christine Vaufrey

Sur les réseaux sociaux je vois tout le temps les mêmes photos. Non. Pardon. Pas les mêmes photos, les mêmes lieux photographiés : un champ de lavande, un village en Norvège, un phare, un temple, un lagon, photographiés sous le même angle avec souvent la même lumière. Des images magnifiques qui finissent par devenir banales tant elles sont reproduites à l’infini. 

C’est l’effet Instagram qui transforme un paradis en enfer à selfies. Un photographe prend un magnifique cliché d’un site encore méconnu et des hordes d’imitateurs viennent copier le paysage avec plus ou moins de bonheur. L’endroit autrefois préservé des masses devient viral et des cars vomissent leurs troupeaux de touristes venus faire un selfie pour dire qu’ils y étaient. La côte amalfitaine en Italie en a fait les frais comme le plateau de Valensole ou bien la tour Eiffel.

C’est vrai que la Terre est toute petite : 153 millions de kilomètres carrés pour 8 milliards d’habitants soit 52 habitants par kilomètre carré. Cela laisse un petit carré de moins de 140 mètres de côté à explorer pour chaque humain. C’est peu.

Quand je pense que nous vivons sur un terrain de 50 par 10 m abritant deux vieux et un chat. Quel luxe indécent ! 

Bien entendu rien n’empêche de voyager. Certains traversent l’océan pour une seule image. Bonjour le bilan carbone ! Je voyage assez peu et jamais très loin. Ma ville comme les paysages des Vosges suffisent le plus souvent à mon inspiration. Un château, une chapelle, un paysage, un bâtiment, une personne dans la rue, je n’ai pas besoin d’aller jusqu’au pôle sud pour trouver un sujet. Bon d’accord, mes photos sont pas non plus virales et pour de bonnes raisons, mais au moins ce ne sont pas de pales copies de paysages magnifiés par de grands photographes.