Evergrey au Grillen

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Finalement j’y suis allé, poussé par ma chérie. C’était pourtant un lundi soir, j’avais encore trois points de suture à la main gauche et une béquille pour soulager le pied droit.

Mais madame est fan de Silent Skies, surtout le premier album, comme moi, et lorsqu’elle a fait le lien entre le chanteur de Silent Skies et Evergrey, elle a voulu aller les écouter. Moi aussi je voulais voir le groupe de Goteborg en live depuis des années. Alors nous y sommes allés, juste après une grosse journée de travail.

Evergrey jouait au Grillen à Colmar en compagnie de Virtual Symmetry et des français de Fractal Universe. Autant dire que la soirée s’annonçait très métal, bien loin de la douce mélancolie de Silent Skies. J’avais prévenu ma chérie que ça allait tabasser, surtout au Grillen qui n’est pas réputé pour la subtilité de son acoustique. 

J’ai bien fait sinon je me serai fait disputer. 

Virtual Symmetry ouvrait les hostilités à 19h30. Du metal progressif assez soft façon Dream Theater ou Evergrey avec des claviers électro et pas de growl. Bon, ça tabassait déjà pas mal.  Le groupe a fait son possible pour mettre de l’ambiance devant le public peu enjoué même si c’était un peu forcé. Je n’avais pas vraiment accroché à leur album Virtual Symmetry mais j’ai trouvé leur prestation live de meilleure facture, surtout vocalement.

Juste après, Fractal Universe prenait la relève. Clément, le batteur, prépare son kit avec soin, s’assurant que tout est bien en place. Il faut dire, comme le prouvera le live, qu’il est le cœur du groupe, un batteur fabuleux, qui écrit la mélodie quand guitare et basse construisent la rythmique. Contrairement à leur album The Impassable Horizon où pointe un peu de chant clair, nous aurons droit essentiellement à du growl bien rugueux, du djent tabasseur technique à souhait et une démonstration de maestria metal. Le saxophone s’invite sur quelques morceaux mais sincèrement, avec l’acoustique défaillante du Grillen et le matraquage des basses, toute forme de subtilité a échappé à mes bouchons d’oreille. J’ai quand même adoré leur set.

Vers 22h c’est Evergrey qui monte sur la petite scène. Le public s’est nettement densifié mais on peut toujours se déplacer jusqu’au bar pour commander un coca. 

Une bière? Non un coca. Voilà votre bière, elle est locale. Je voulais un coca… Une bière ? Non un coca. Elle est bonne notre bière. Ok, bon ben je prendrai une bière alors.

Tom n’a manifestement pas chauffé sa voix avant de grimper sur scène. Les débuts sont rocailleux. Mais après deux morceaux, le diésel est chaud, et malgré une certaine fatigue, nous retrouvons la voix de Evergrey. Comme l’a finement remarqué mon épouse, Rikard Zander n’est pas Vikram Shankar (Silent Skies) et Jonas Ekdakri  n’est pas Clément Denys (Fractal Universe). Mais les guitares de Henrik Danhage sont à la hauteur comme la basse de Johan Niemann. L’ensemble fonctionne à la perfection et la prestation de Evergrey est juste impressionnante.

Je n’apprécie le groupe surtout depuis leurs trois derniers albums. Alors lorsqu’ils ont exploré de vieux morceaux j’ai un peu décroché. D’autant que la fatigue de la journée commençait à se faire sentir et que le pied devenait de plus en plus sensible.

Ce fut un belle soirée métal, d’autant plus exceptionnelle que je l’ai partagée avec mon épouse, plus habituée aux auditoriums de musique classique qu’aux salles remplies de métallos en furie. Mais elle, plus tenace que moi, a réussi après avoir lourdement insisté, à avoir du coca dans son verre.

ps : les photos proviennent de mon smartphone, désolé…

Cosmograf – Heroic Materials

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A 99 ans, l’ancien aviateur William May, indicatif ‘Billy’, jette un œil sur sa vie et réalise qu’il ne comprend plus rien au monde qui l’entoure. Il a combattu dans la Royal Air Force à bord d’un Spitfire lors de la Seconde Guerre mondiale. Lui qui fut le roi du ciel dans son avion, héros de guerre et aujourd’hui il n’est plus qu’un vieil homme perdu dans ce monde qui a tant changé.

Avec Heroic Materials, nous voici plongés dans un nouveau récit en musique de trois quart d’heure et dix morceaux, dont une pièce fleuve de treize minutes, composé et joué par Robin Armstrong, l’homme derrière le projet Cosmograf.

Je n’adhère pas à tout ce qu’à pu écrire Robin par le passé mais si je devais ne retenir que trois albums de son œuvre, ce seraient The Man Left In Space en 2013, The Hay-Man Dreams en 2017 et Heroic Materials cette année.

Pour ce disque, Robin est accompagné de Danny Manners (ex Big Big Train) au piano sur le titre album et de Kyle Fenton à la batterie de l’excellent groupe Arrival. Ici pas d’invité vedette pour faire la promotion mais Cosmograf a suffisamment de notoriété dans la sphère progressive pour pouvoir s’en passer même s’il ne signe toujours pas avec des labels comme Kscope ou Inside Out.

J’avoue que j’ai pris peur en écoutant le premier titre de l’album. Dans ‘I Recall’, Robin chante vraiment très perché, trop haut diraient certains et cela ne repose pas vraiment les oreilles. Par chance, cela ne dure que trois minutes. Après, il redescend légèrement dans la gamme et c’est nettement plus confortable.

Pour situer Cosmograf, sa musique s’apparente un peu à du Porcupine Tree, aux Beatles, à Marillion ou à Pink Floyd par exemple. Je ne dit pas néo-prog, car sinon ils vont encore s’énerver avec John Mitchell, et d’ailleurs, ça n’est justement pas du néo-prog, mais plus une pop progressive. 

Il s’agit d’un rock progressif, parfois cinématique avec quelques bruitages et enregistrements audio qui illustrent les morceaux comme dans le court ‘Here’. Le chant est très présent sorti de ‘Regretful Refrain’, ‘Here’ et ‘Heroic Materials’, accompagné par une musique bien équilibrée entre claviers et guitares aux références confortables. Par exemple, ‘Regretful Refrain’ rappelle Pink Floyd quand ‘If Things Don’t Change’ se rapproche plus de Porcupine Tree.

L’humain est toujours au cœur des histoires de Cosmograf et une de ses  forces réside dans l’émotion qui se dégage de son travail. Les bons albums de Robin bouleverse celui qui les écoute et Heroic Materials n’échappe pas à la règle. A tel point que je me suis posé la question de me l’offrir en vinyle (je sais la planète blablabla…) mais à plus de 40 euros la galette frais de port compris plus les taxes, ça fait réfléchir tout de même. Bon, je l’ai pré-commandé quand même.

Le titre album, avec Danny Manners au piano, joue également d’orgues et de guitares progressives pour évoquer les avions de chasse ainsi que le début de la guerre, lorsque William s’engage à 18 ans dans la Royal Air Force. Un titre progressif à souhait avec de grandes sections instrumentales et changements de tempos. Une pièce magistrale qui n’éclipse pourtant pas les autres morceaux de l’album. 

Je l’ai déjà dit plus haut, Heroic Materials figure parmi mes trois albums préférés de Cosmograf. Peut-être le meilleur bien que The Hay-Man Dreams soit fabuleux. Il rentre de ce pas dans mon top 2022. Si vous avez peur de dépenser plus de quarante euros pour l’écouter lorsque le vinyle aura été pressé, vous pouvez toujours l’écouter sur Bandcamp et plus si affinités.

Lapinot chez les irréductibles gaulois

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C’est encore Alias qui avait parlé de cette BD. Non content de me vendre des disques, il fait craquer les rayonnages surchargés de la bibliothèque.

Par Toutatis ! est la nouvelle bande dessinée de Lewis Trondheim. Lapinot se réveille dans le corps d’Astérix, dans le village des irréductibles gaulois inventé par Uderzo et Goscinny. 

Vous savez peut-être que j’ai la collection complète des aventures d’Astérix le Gaulois, ce furent mes premières lectures et une tradition familiale. Même si les BD battent de l’aile depuis le décès de sont fabuleux scénariste, j’ai continué la collection rien que pour perpétuer la tradition.

Je connais beaucoup moins l’œuvre de Trondheim sorti Donjon et quelques BDs. Mais l’idée de revisiter l’univers d’Astérix avec Lapinot me semblait excellente.

Nous sommes en Armorique occupée par les romains mais un village d’irréductibles gaulois résiste toujours à l’envahisseur, enfin vous connaissez l’histoire… Lapinot se réveille dans la peau d’Astérix, découvre la potion magique et ses effets trash sur les pauvres romains. C’est à ce moment que surgit le dieux Toutatis venu dire bonjour aux villageois et goûter à la recette de la potion magique.

Lewis Trondheim pastiche à la perfection Astérix le Gaulois, sur le fond comme sur la forme mais avec son graphisme bien à lui et j’avoue que j’ai eu un immense plaisir à lire cette BD, bien plus que les derniers Astérix en fait.

Soirée Klonosphère

Klonosphère est un label indépendant français qui lance de nombreuses jeunes pousses dans une carrière musicale. Fut un temps où je travaillais avec leur équipe pour promouvoir certains de leurs talents.

Et samedi dernier, dans la nouvelle salle de la Maison Bleue que je n’avais pas encore étrennée, le label organisait une soirée spécial Klonosphère avec trois de leurs groupes, Howard, Patron et LDDSM.

Comme j’avais manqué Soen dans la même salle pour des raisons médicales et que j’allais probablement manquer Evergrey au Grillen à Colmar pour les mêmes raisons, je le suis dit qu’une soirée Klonosphère ne me ferait pas de mal.

Dans les faits, ça ne s’est pas passé du tout comme je l’imaginais.

J’y allai pour LDDSM dont j’ai la première et dernière galette. J’avais écouté Howard une fois avant de les classer dans les groupes hors sujet pour Neoprog et Patron, eux sortaient clairement du la ligne éditoriale de l’époque.

Avec une aponévrite au pied droit et trois points de suture à la main gauche, pas question pour moi de photographier les concerts. Je n’aurais pas pu tenir le boîtier et encore moins porter le matériel. Déjà rester debout pendant plusieurs heures allait se révéler une véritable torture.

Alors j’ai occupé mes mains avec une bière blanche locale à la pression. C’est pas mal aussi.

Le public n’est vraiment pas au rendez-vous. Je compte une quarantaine de personnes comprenant la famille, les amis et les musiciens dans le public. La misère quoi.

Howard ouvre le bal du samedi soir, un premier concert, deux années après avoir sorti leur première galette et s’être morfondus pendant le confinement. Trois jeunes qui en veulent sur scène. Par chance ils ne se souviennent pas de moi, du moins ils ne se sont pas manifestés. Car suite à un malentendu avec leur label, je me suis retrouvé face à eux et assez surpris un jour, pour une interview que je devais réaliser avec un autre groupe. Malaise. Je n’avais pas écouté leur album, je ne les connaissais pas et surtout n’avais pas de temps à leur accorder pour une interview. J’aurais dû.

Clavier, synthétiseur analogique Korg, orgue Hammond, batterie, guitare et chant, le trio joue un rock à la frontière de plusieurs genres dont le progressif. Ils jouent bien, très bien même, ils en veulent, possède de l’énergie à revendre et leurs morceaux sont furieusement accrocheurs avec de superbes passages aux claviers. J’ai tout simplement adoré leur prestation, surtout pour un premier concert. Bravo les gars.

Patron c’est un autre genre, un quatuor, guitares, basse, batterie plutôt ancré dans un rock américana parfois un peu sixties. Le chanteur au look Happy Days (qui sort juste du COVID-19) possède une voix grave absolument dingue et belle. Le batteur est une machine de guerre infatigable fascinante à regarder. Quant au guitariste asiatique et au bassiste yogi, pas grand chose à en dire, ils passent tous deux inaperçu. Nico, le guitariste de Los Disidentes del Sucio Motel s’invite sur scène pour un morceau avec le groupe, une manière de galvaniser la ‘foule’ qui est fan du groupe strasbourgeois.

Passé la première fascination pour le chant et la batterie, je décroche assez vite de la musique qui n’est vraiment pas ce que j’aime écouter. Alors cette je m’offre une seconde bière artisanale brune cette fois. D’ailleurs elle me plaît moins, comme la suite de la soirée.

LDDSM arrive en terrain conquis. Les rares spectateurs sont tous acquis à leur cause. Le groupe rentre à la maison après une longue absence, bref tous les ingrédients sont réunis pour offrir un bon concert. Cinq musiciens sur scène, deux guitariste, une bassiste, un batteur et un chanteur, devrais-je dire crieur mini claviériste. Ils sont détendus, sans doute un peu trop relax même, limite pas très pro ce qui donnera un superbe loupé de tonalité et une guitare désaccordée en plein set. 

En studio, la musique de LDDSM est assez chargée, limite brouillonne, du stoner quoi. En live, c’est bien pire. Le chant à trois voix où chacun y va de sa tonalité passe peut-être pour des personnes pas calées au diapason mais pour moi cela devient vite une torture sonore. Sorti de deux trois morceaux moins chargés, la prestation de Los Disidentes del Sucio Motel m’a clairement déçu, d’ailleurs, je suis parti avant la fin du concert, autant à cause de la musique que de la douleur grandissante dans le talon droit. 

Malgré une soirée en demi teinte, je retiens Howard que je vais réécouter de ce pas et je m’excuse platement après d’eux pour cette interview manquée, même si à l’époque, en plein confinement, je ne pouvais pas la réaliser. Au passage, je tiens à signaler que la nouvelle salle de la Maison Bleue est vraiment très bien, idéale pour des concerts de deux cent à trois cent personnes.

Esthesis – Watching Worlds Collide

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Il n’ y a pas si longtemps, nous parlions ici des imitateurs de Porcupine Tree. Figurez-vous que le sujet revient sur la table avec le second album du groupe Esthesis.

Esthesis est un projet français qui après un EP en 2019 accouchait d’un premier album un an plus tard. Un projet ultra centré sur Aurélien Goude, chanteur, compositeur, guitariste et claviériste manifestement très influencé par Wilson et sa bande.

Pour ne pas vous mentir, The Awakening sorti en 2020 ne m’avait pas emballé. D’ailleurs, je n’avais pas l’intention d’écouter la suite après avoir vu leur concert Chez Paulette. Puis Watching Worlds Collide est sorti, sept morceaux pour près d’une heure de musique. 

La première écoute m’a beaucoup rappelé leur proximité avec Porcupine Tree ainsi que leur premier album alors j’ai décroché au quatrième morceau. J’ai quand même réessayé un peu plus tard pour finalement acheter l’album.

Oui, ne nous mentons pas. Watching Worlds Collide emprunte encore beaucoup à Porcupine Tree. La bande à Wilson hante tous les morceaux de manière plus ou moins prononcée et c’est sans doute sur le dernier titre jazzy que cela s’entend le moins. Toutefois, les maladresses de jeunesse semblent oubliées et Esthesis est allé un peu plus loin dans son approche jazzy et dans ses couleurs cuivrées.

Si ‘Amber’ est un quasi cover de Porcupine Tree agréable à écouter mais sans grand intérêt malgré le saxophone de Maceo et la batterie bluffante d’Arnaud, ‘57th Street’ est une pièce particulièrement originale. Un titre cinématique de douze minutes à l’atmosphère de film noir. Plus surprenant encore est ce ‘Skimming Stones’ au piano qui s’enrichit du violon de Mathieu Vilbert. Ce titre figure parmi mes préférés de l’album. ‘Place Your Bet’, un peu comme l’instrumental ‘Vertigo’ est une chose hybride entre funk, alternatif et jazz, qui malgré quelques passages très wilsonniens, tire bien son épingle du jeu.

Watching Worlds Collide se révèle finalement être une très belle surprise. Esthesis affirme son identité musicale et s’il n’y avait cette forte proximité avec Porcupine Tree, il aurait pu devenir l’album de l’année.

Chien 51

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La Grèce s’est effondrée. Elle a été rachetée par une multinationale. Les habitants d’Athènes comme Sparak sont devenus des employés citadins. 

Après la Grèce, les autres nations de la planète ont peu à peu été rachetées.

Les élections battent leur plein sous le dôme climatique de Magnapole. Qui sera le nouveau conseiller ? Kanaka ou bien Barsok ? L’homme de la zone 1 ou le populiste qui veut abolir les frontières entre les zones.

Sparak, le policier de la zone 3, celle des parias, mène une enquête pour meurtre avec Salia une enquêtrice de la zone 2, celle des privilégiés. Une enquête qui les conduira au paradis des élites, la zone 1, celle de tous les privilèges.

Laurent Gaudé nous plonge avec Chien 51 dans un roman policier futuriste désespéré. Le climat a fini par devenir fou. La société est revenue au système des castes. Les nations n’existent plus et les hommes, inféodés, trahis, vendus, n’ont plus d’espoir. 

Avec cette enquête Sparak va replonger dans ses souvenirs, la femme qu’il a aimé, la chute de la Grèce, sa trahison, l’exode. Il va découvrir ceux qui ont contribué comme lui à l’effondrement de son pays. Un roman sombre, désespéré, qui donne un éclairage terrible sur un futur possible de notre monde.

Ce n’est pourtant le roman de Laurent Gaudé que je vous recommanderai. Je ne suis pas vraiment rentré dans son monde pas plus que je n’ai cru à ses personnages. Lisez plutôt Le Soleil des Scorta, La Mort du Roi Tsongor ou le magnifique Eldorado.

Le talon d’Achille

Deux semaines de vacances à la maison en septembre. Le bonheur ! La saison idéale pour des promenades dans les Vosges, le jardinage, la photographie et la lecture sur un transat.

Je suis ce que l’on appelle vulgairement un pantouflard, quelqu’un qui aime sa maison, son jardin et les promenades dans la région.

Peu avant de profiter de ces congés mérités, je traînais un peu la patte, une douleur sourde dans le talon, rien de grave, sans doute de la fatigue. Mon hernie discale était également de la fête comme un truc coincé à l’épaule. Rien qu’un bon repos ne saurait réparer.

Le premier lundi des vacances, je pris la route du Parc de Sainte-Croix pour saluer les loups, les ours et les ratons laveurs. Mon traditionnel safari photo de la fin de l’été. Trois heures de route, six heures de marche, six kilos de matériel photo sur le dos, autant dire que je suis revenu cassé en deux, mais heureux. Ceci dit, une petite douleur irradiait du talon jusque mes orteils et mon dos était en compote. Du coup le mardi, j’ai zombifié.

Mercredi, pluie. J’ai acheté quelques albums sur Bandcamp et en ai écouté beaucoup d’autres. Jeudi, pluie, musique. Après un été de sécheresse, il fallait que le ciel me tombe sur la tête pendant les vacances. Du coup, le jardin c’est brutalement transformé en jungle.

Vendredi, débrousaillage, tonte, désherbage, jardinage et passages aux déchets verts. Une écharde d’un bon centimètre s’est plantée dans mon pouce gauche. L’opération pince à épiler a été un pur régal et je crois qu’un petit bout est resté coincé sous la peau, histoire de me rappeler de porter des gants plus épais la prochaine fois.

Lundi, je suis reparti dans les Vosges, à la cascade du Nideck en traînant un peu la patte ce qui ne m’a pas empêché de prolonger la marche. Mardi j’ai fait une nouvelle promenade plus longue encore, du côté de l’étang de Hanau, et mercredi je suis allé voir le médecin, car même la nuit, mon talon me lançait. Verdict, un truc au nom imprononçable de la famille des tendinites, le genre de chose qui met du temps à guérir à condition de rester au repos total.

Mercredi soir, c’était soirée Star Wars, trois épisodes de la nouvelle série Andor à déguster au calme. Enfin en théorie, car à table, après avoir avalé un anti inflammatoire pour le talon, avec pour effet secondaire d’affaiblir la coagulation du sang, je me suis planté un couteau très pointu dans la paume de la main gauche. Planté oui, et profondément vous voyez. Alors ça s’est mis à pisser rouge.

Un dénoyautage d’avocat bien mûr qui s’achève aux urgences. Trois points de suture plus tard me voilà avec un énorme pansement à garder pendant trois semaines, le genre de truc qui vous empêche de conduire, de tenir un appareil photo, de taper au clavier, sauf d’une main, de découper un avocat en deux et d’en extraire le noyau. Ceci dit, pour cette dernière activité, ça n’est peut-être pas plus mal…

Le jeudi, ce furent des visites au pharmacien qui m’avait vu la veille, à l’infirmière pour programmer ses prochains passages à la maison pour changer le pansement, au radiologue hilare de photographier mon pied alors que ma main est bandée, à l’autre radiologue pour l’échographie, amusé de retrouver ma bosse sur le gros orteil et pour finir au médecin étonnée de me revoir si vite. Un tout nouveau programme de vacances qui vont se prolonger, en survêtement et sandales, parce que les ceintures, les boutons et les lacets, c’est devenu trop compliqué pour l’instant. Quelqu’un peut me couper la viande ? S’il vous plait…

Dim Gray – Flown

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C’est la publication de mon ami Chris Pitchman sur Facebook qui m’a donné envie d’écouter Dim Gray. Le trio de rock atmosphérique norvégien assurait la première partie des concerts de Big Big Train en septembre. Une raison suffisante pour les écouter.

Alors je suis allé sur Bandcamp et surprise, je me suis aperçu que je les suivais déjà. Alors pourquoi n’avais pas encore acheté Flown sorti pourtant en 2020 ? Je n’ai pas la réponse, mais c’est réparé.

Flown ce sont douze titres de une à six minutes chantés par Oskar sur une musique peuplée de nombreux instruments. Car si le groupe est un trio, il s’est entouré de six autres artistes pour enregistrer leur premier album Flown. Guitares, mandoline, piano, claviers, harmonium, percussions, programmation, basses, violon, chant, chœurs, leur univers est très riche comme leurs inspirations qui débordent largement du cadre du rock atmosphérique.

Flown propose cinquante-deux minutes relativement paisibles qui ne sont pas sans rappeler Soup ou Drowning Steps. Un mélange d’alternatif, de progressif, de folk et de post-rock dominé par la voix claire d’Oskar.

Chez Dim Gray, outre une fibre classique soulignée par les instruments à cordes comme dans ‘Again’, il y a un côté folk assumé avec ces notes de mandoline dans ‘Song for E’, cette touche de Mike Oldfield dans ‘Wave We Thought We’d Ride Forever’ ou ce parfum irlandais au début de ‘Close’ et dans ‘Black Sun’.

La pochette en dégradé de gris pourrait représenter une personne allongée dans les hautes herbes ou bien un tertre se dressant dans une forêt nimbée de brume hivernale. Laissez votre imagination en décider en lisant le livret.

Deux courts instrumentaux se glissent dans l’album. Il s’agit de ‘Flown’ et ‘Yore’ qui encadrent le titre ‘Light Anew’. Le premier , particulièrement bref, démarre tout doucement. Quelques rares notes  qui s’élèvent au-dessus de la brume et qui servent de tremplin à ‘Light Anew’. Le second prolonge la musique de quelques tonalités étranges et solitaires, construisant avec ‘Flown’ une pièce progressive de près de dix minutes.

Au moment où je vous parle, Dim Gray vient de sortir son second album Firmament. Je ne tarderai pas à vous en parler également.

Autoportrait

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Difficile d’apprendre à jouer avec la lumière lorsque vous n’avez pas de modèle sous la main.

Je dispose bien des projecteurs, de l’écran et de l’appareil photo, mais personne à placer devant l’objectif.

Alors c’est moi qui m’y colle.

A l’aide de l’application SnapBridge de Nikon, je peux contrôler le boîtier à distance, régler quelques paramètres, regarder ce que je cadre et prendre la photo. 

Une télécommande de luxe bien pratique même s’il faut que je m’y reprenne toujours à deux fois pour établir la connection avec l’appareil photo. Je croyais qu’ils avaient corrigé ce bug. Ben non.

Donc je parlais de portraits et d’éclairages. Avec un fond noir, deux spots LED sans softbox, je travaille la position de la lumière sur le visage pour obtenir différents éclairages et textures.

Ce n’est pas facile car il faut regarder le smartphone où se trouve l’application SnapBrige pour se faire une idée du résultat et fatalement lorsque l’on prend la photo, le visage et les yeux bougent un peu, le temps de baisser les bras pour cacher l’écran.

Lumière dure, noir et blanc accentué avec beaucoup de clarté, c’est comme ça que j’aime les photographies depuis pas mal de temps, on va dire que c’est mon style à moi.

Le défaut et l’intérêt de ces traitements, c’est que cela exacerbe tous les petits défauts de la peau, les rides, les poils, les tâches, et de ce côté là je suis gâté. J’ai même dû retravailler certaines images pour ‘épiler’ les oreilles et le nez. Oui c’est moche de vieillir. Pour le rendu brumeux ouateux à la David Hamilton, vous repasserez. Après, j’ai amplement dépassé l’âge de ses modèles.

Alors pas de panique, si mes épaules sont dénudées, c’était pour l’esthétique toute relative de la chose. Je ne suis pas narcissique au point pour poser à poil. Je le précise car j’ai eu des réflexions à la maison et comme mes voisins me prennent pour un pervers, autant être clair, hein les petits enfants, vous aimez les films de gladiateurs ?

Bon passons.

Pour ne pas avoir à trop retravailler l’image, je n’éclaire pas le fond noir, les spots regardent un peu vers l’objectif. J’ouvre à 2.8 pour flouter le fond ce qui me permet également de moins éclairer.

Je n’ai d’abord allumé qu’un des deux spots pour obtenir une ombre très marquée sur le visage. Puis j’ai varié l’orientation de celui-ci, de face, de côté, aux trois quarts, de dos, car ici c’est le modèle qui doit bouger, l’appareil est sur un pied. Ensuite j’ai ajouté une seconde lumière, plus faible pour déboucher les ombres. Cela donne des images plus douces, moins contrastées malgré mon traitement noir et blanc très tranché.

J’ai fait une seconde série le lendemain, plus habillée cette fois, cadrée plus large, en ajoutant un petit projecteur LED dans le but de faire briller les yeux (raté) et en mettant en place les softs box. Entre temps je m’étais rasé même si ce n’est pas flagrant. J’ai posé le smartphone sur un pied également pour être plus à l’aise et mieux voir ce que je photographiais. Un des projecteurs éclairait le plafond blanc à 45 degrés, l’autre en partie tourné vers l’objectif, illuminait mon côté gauche.

Il faudrait sans doute que je rejoigne un club photo pour approfondir toutes ces techniques au lieu de jouer tout seul à poil dans mon salon…

Ar-Men

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Les mots me manquent pour vous parler de Ar-Men de Emmanuel Lepage.

En passant dans la boutique de bandes dessinées préférée à Strasbourg (Bildegarde rue des Serruriers pour ceux que cela intéresserait), je glanais quelques lectures en retard comme Toutatis et le préquel à Orbital. En errant au milieu des auteurs et des séries, je suis tombé également sur Ar-Men.

Ar-Men est un phare au bout du monde, non loin de l’île de Sein, sur ma terre natale, la Bretagne.

J’ai toujours été fasciné par les phares, je me serais bien vu gardien, dans cette solitude au milieu du déferlement des éléments, un rêve romantique qui n’a pas résisté à l’automatisation de ces veilleurs géants des océan. 

Le roman Ar-Men de Jean-Pierre Abraham, que Emmanuel Lepage cite dans ses sources d’inspiration, est un de mes livres de chevet. C’est tout dire. J’adore grimper les centaines de marches de ces colonnes de pierres pour respirer les embruns lorsque j’en ai l’occasion et l’optique complexe des feux m’a toujours fascinée. 

Un…, deux…, trois…, longue pause…

Lepage, je l’ai rencontré avec Voyage aux Iles de la Desolation puis dans Un Printemps à Tchernobyl et dans bien d’autres romans illustrés depuis. Il écrit des reportages en aquarelles, saisies sur le vif. Il raconte de magnifiques histoires qui me touchent à chaque fois.

Ar-Men parle du phare, de ses gardiens, de la Légende de la ville d’Ys, des gens de Sein, des naufrages sur la Chaussée, de la  longue, périlleuse et laborieuse construction du phare et de son automatisation. L’histoire des pierres et de la chair qui hantèrent ses escaliers en spirale. L’histoire de ses gardiens, de leur quotidien et de ce qu’ils fuyaient en s’enfermant pendant des jours dans cette tour au milieu des éléments en furie.

La narration est magnifique, le dessin est sublime, les couleurs fabuleuses. Il s’agit du plus beau roman graphique d’Emmanuel Lepage et pourtant, croyez-moi, ce n’est pas peu dire.